Un condé
Réalisation Yves Boisset
Scénario Yves Boisset
Claude Veillot
Sandro Continenza
Acteurs principaux
Sociétés de production Empire Films
Stéphan Films
Pays d’origine Drapeau de la France France
Drapeau de l'Italie Italie
Genre Policier
Durée 95 minutes
Sortie 1970


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Un condé est un film policier franco-italien réalisé par Yves Boisset, sorti en 1970. Troisième film réalisé par Boisset, il narre l'histoire d'un policier, incarné par Michel Bouquet, qui cherche à venger la mort de son ami et collègue, abattu alors qu'il enquêtait sur une affaire de drogue, quitte à enfreindre la loi. Les autres rôles notables sont interprétés par Françoise Fabian, Michel Constantin, Gianni Garko et Bernard Fresson.

Le film est notable pour avoir connu des problèmes avec la censure. En raison de la représentation de la police et de la violence du personnage, le ministre de l'intérieur Raymond Marcellin tenta en vain d'obtenir l'interdiction totale du long-métrage[1]. La publicité faite autour de la censure de Un condé a permis au film de rencontrer un succès auprès du public[1].

Synopsis

L'inspecteur Favenin (Michel Bouquet) revient en poste dans la petite ville, dont il avait été autrefois muté pour indiscipline. Il y retrouve son vieil ami et collègue Barnero (Bernard Fresson), un policier désabusé.

La ville est en effet sous la coupe d'un certain Tavernier, dit « le Mandarin ». Officiellement promoteur immobilier, Tavernier règne en réalité sur le racket des commerçants, la prostitution et le trafic de drogues, et il bénéficie de nombreux contacts dans l'administration locale, ce qui le rend quasiment invulnérable, d'autant plus qu'il prend soin de ne jamais laisser de preuves de ses méfaits. De plus, il se prépare à se lancer en politique, sur la liste de la majorité. Ses hommes de mains, dirigés par Beausourire, viennent d'assassiner Roger Dassa, le propriétaire d'un bar qui refusait de laisser son établissement accueillir le trafic de drogue. Après la mort de Dassa, son ami Dan Rover (Gianni Garko), un ancien truand qui a « raccroché » se sent coupable de ne pas avoir pu le protéger. Hélène, la sœur de Roger Dassa, arrive de Londres pour prendre la succession de son frère. Elle refuse l'aide de Dan, qu'elle soupçonne d'être resté un truand dans l'âme et d'être responsable de la mort de Roger.

Rapidement, les hommes de main du « Mandarin », conduits par « Beausourire » (Henri Garcin), se présentent à la boîte de Dassa et rencontrent Hélène. Comme son défunt frère, elle refuse de collaborer avec le trafic de drogue. Les truands saccagent alors l'établissement et la tabassent. Le lendemain, Dan la recueille chez lui, bien décidé à venger son ami et sa sœur, même contre l'avis de celle-ci. Il fait appel à François Villetti (Michel Constantin), un ami avec qui lui et Dassa ont baroudé en Afrique. Ils décident d'éliminer le « Mandarin » à la fermeture de son cercle de jeu, tard dans la nuit.

Barnero et Favenin surveillent discrètement Dan et Villetti. La nuit où les deux hommes passent à l'action, ils attendent d'abord d'entendre des coups de feu pour intervenir. En effet, Barnero a bien l'intention de « laisser filer » ceux qu'il considère comme des bienfaiteurs et qui viennent de tuer Tavernier. Mais, poussé par Favenin, il se résout à les poursuivre. Subitement, Barnero est abattu par l'un des deux fuyards.

Le lendemain, Favenin demande à diriger l'enquête pour venger son ami. Le commissaire principal, un homme corrompu, lui accorde la direction de l'enquête. Il lui fait comprendre qu'il ne le soutiendra d'aucune manière, mais qu'il le laissera agir comme il l'entend. Favenin commence alors à enquêter seul, sans s'embarrasser de mandats, d'éthique ni de légalité, persuadé que « la police est un métier sale, que l'on ne peut faire que salement ».

Fiche technique

Distribution

Production

Développement

Le réalisateur et coscénariste du film Yves Boisset.

En 1969, le réalisateur Yves Boisset, qui vient de tourner son second film Cran d'arrêt, est choisi par la productrice Véra Belmont pour adapter La Mort d'un condé, récit de l'auteur Pierre Lesou, qu'elle a découvert par l'intermédiaire de Claude Sautet[3]. La mise en chantier du film est marqué par l'après Mai 68 et la violence qu'a exercée la police sur les manifestants, ce qui a révolté Boisset[4]. De plus, quelques productions cinématographiques après ces événements présentant une vision aussi dure du policier et une analyse aussi ambiguë du fonctionnement de l’autorité policière en France tels que Max et les Ferrailleurs de Claude Sautet, La Bande à Bonnot de Philippe Fourastié et Solo et L'Albatros de Jean-Pierre Mocky[3]. À l'origine, Antoine Blondin devait co-écrire l'adaptation avec Boisset, avant d'être remplacé par Claude Veillot[5].

L'acteur Michel Bouquet, interprète de l'inspecteur Favenin.

Lino Ventura fut envisagé pour incarner le rôle-titre du « condé », l'inspecteur Favenin, basé sur le père policier de Lesou[4], mais l'acteur, trouvant le personnage trop antipathique, décline la proposition[3]. C'est alors que Boisset apporte le profil d'un acteur à l'opposé de Ventura pour incarner Favenin, Michel Bouquet, qui incarnait jusque là des personnes faibles[3]. Afin de se préparer au rôle et avec l'aide de Boisset, Bouquet adopte une nouvelle coupe de cheveux, tandis que le réalisateur lui donne un costume sombre et l'affuble à presque tous les plans de gants noirs[3].

Françoise Fabian, qui vient de triompher notamment avec Ma nuit chez Maud, tient l'un des rares rôles féminins du film. À l'origine, c'est Michèle Mercier qui était envisagée, mais elle a refusé le rôle quand Antoine Blondin, co-scénariste prévu pour l'adaptation, s'est présenté ivre à une entrevue avec l'actrice en compagnie de Boisset et s'est montré odieux envers elle, avant qu'elle mette les deux hommes à la porte de chez elle[5]. Michel Constantin, remarqué dans Le Deuxième souffle et Dernier Domicile connu, incarne le tueur Villetti. L'acteur italien Gianni Garko tient l'un des rôles centraux du film, celui de Dan Rover. Un condé marque le deuxième et dernier rôle au cinéma du chanteur Théo Sarapo, qui meurt moins de deux mois avant la sortie du film dans un accident de voiture.

Censure

En raison de son sujet (la représentation de la police) et de sa violence, Un condé va connaître quelques démêlés avec la censure[4],[6],[3]. À l'époque où le tournage du long-métrage allait débuter, il existait une pré-censure sur scénario, qui a obtenu que le titre initial, Le Condé, soit changé en Un condé[4]. Une fois le tournage fini, un montage définitif du film est déposé au CNC avec une demande de visa[4]. Lors de sa présentation en sous-commission, le représentant du ministre de l'intérieur de l'époque, Raymond Marcellin y voit « un violent réquisitoire contre la police » et Un condé est renvoyé en séance plénière[4].

L'acteur Gianni Garko (ici dans Le Temps des vautours, interprète de Dan Rover. La scène de l'interrogatoire musclé concernant son personnage fut en partie au centre des problèmes qu'à eu Un condé avec la censure.

Comprenant que son film peut écoper d'une interdiction totale, Boisset contacte les membres les plus libéraux de la censure avant le passage en séance plénière, pour expliquer sa position[4]. La séance, ayant lieu le , déclenche un vif et houleux débat entre les vingt-sept membres de la commission de censure, dont fait partie le réalisateur Jean-Pierre Melville, évoquant l'effet catastrophique que peut causer l'interdiction du film devant la partie la plus intransigeante de l'organisation[4]. Après un débat durant deux heures qui s'éternise, la commission vote à bulletin secret et le film échappe à une interdiction totale en salles à deux voix de majorité[4], émettant un avis pour une interdiction aux moins de 13 ans sans coupure au ministère de la Culture, avec une date de sortie prévue le , ce qui provoque la colère du représentant de Marcellin[4]. Sous la pression de Marcellin, le ministre des affaires culturelles Edmond Michelet ajourne la signature du visa de censure autorisant la diffusion du film[4]. À la demande du ministre, Un condé est de nouveau renvoyé en séance plénière, la production demande aux membres favorables au film de le soutenir à nouveau[4]. Marcellin demande que dix-huit minutes soient coupées, dont les scènes concernant le commissaire incarné par Adolfo Celi et plusieurs répliques, ou encore la scène de l'interrogatoire musclé de Rover par Favenin[4], bloquant de nouveau la sortie.

Alors que Boisset, qui refuse de faire des coupes qui rendraient le film totalement incompréhensible et inexploitable, est massivement soutenu par la presse, les différents ministères entament de longues et âpres négociations en coulisses à propos du film[4]. Après la suppression de quelques dialogues, et une fois la scène de l'interrogatoire retournée, Un condé est finalement autorisé et sort en salles en [4]. La scène originale de l'interrogatoire de Rover fut conservée dans le montage du film pour sa sortie en Italie[7]. Véra Belmont, quant à elle, a été poursuivie en justice pour avoir utilisé son fils mineur lors d'une scène où Favenin tabasse le personnage de Rufus, après que la commission cinéma de la DDASS, qui autorise les enfants à tourner des films, a émis un avis négatif à la présence de l'enfant (bien qu'un huissier fut présent sur le plateau pour attester que le garçon n'a pas subi de dommages psychologiques)[4].

Accueil

Box-office

Sorti le dans les salles françaises assorti d'une interdiction aux moins de 13 ans, Un condé connaît un démarrage correct avec 62 752 entrées dans neuf salles lors de sa première semaine d'exploitation[8],[9]. Bien aidé par la publicité faite par ses démêlés avec la censure[6] et distribué dans vingt-huit salles[10], il prend la semaine suivante la première place du box-office avec 136 153 entrées, pour un total de 198 905 entrées[11], avant d'être délogé dans sa troisième semaine par Le Cercle rouge, rétrogradant en seconde place, mais en ayant été vu par 155 501 spectateurs, soit un cumul de 354 406 entrées, dans quarante-huit salles[12],[13]. Début , le film passe le cap des 500 000 entrées[14]. Un condé se maintient bien au box-office en restant dans le top 10 jusqu'à l'approche des fêtes de Noël, où il se trouve en seizième position, en s'approchant des 900 000 entrées depuis sa sortie[15]. Pour sa première année d'exploitation, le long-métrage affiche 928 750 entrées, ce qui lui permet de se classer à la 36e place du box-office annuel, alors qu'il est diffusé dans cinquante-quatre salles, son plus haut ratio de salles depuis sa sortie[16],[17].

Le film passe le million d'entrées la semaine du [18] avant de quitter le top 30 hebdomadaire début février après avoir été vu par 23 971 spectateurs, pour un cumul de 1 101 982 entrées[19]. Pour sa deuxième année d'exploitation, Un condé a été vu par 338 744 spectateurs[20], portant le total à 1 267 494 entrées depuis sa sortie. En fin d'exploitation, le long-métrage finit avec 1 328 785 entrées[21].

Exploitation en vidéo et à la télévision

Après sa sortie en salles, Un condé fut diffusé à la télévision notamment le [22], mais un conflit entre la productrice Véra Belmont et l'auteur de l'histoire originale, Pierre Lesou, entraîna la rareté du film depuis 1975[23], bien qu'il ait connu une sortie en cassette vidéo en 1981[24]. Il devra attendre le pour être édité pour la première fois en DVD chez Opening[25]. En 2019, ESC Editions réédite le film en vidéo, ayant bénéficié d'un nouveau master scanné en 4K et restauré en 2K, sortant en DVD[26] et pour la première fois en disque Blu-ray [27].

Le film est aussi rarement diffusé à la télévision, sauf sur les chaînes thématiques consacrés au cinéma, notamment sur Ciné+ Classic en [28]. Le , Un condé est rediffusé en prime time sur Arte[29] et a été vu par 1,44 million de téléspectateurs[30].

Notes et références

Notes

  1. a et b Non crédité au générique.
  2. Avant la réévaluation du palier d'interdictions des longs-métrages en 1990, Un condé fut interdit aux moins de 13 ans.
  3. Crédité John Garko au générique.
  4. Crédité Marcel Gassouc au générique.

Références

  1. a et b Anaïs Kien et Charlotte Roux., Histoire d’Un Condé, ou les nuits sans sommeil de Raymond Marcellin. France Culture, mardi 21 octobre 2008, dans l'émission La Fabrique de l'Histoire
  2. « UN CONDE : Visas et Classification », sur CNC, (consulté le ).
  3. a b c d e et f Philippe Paul, « Un Condé d'Yves Boisset (1970) - Analyse et critique du film », sur DVDClassik, (consulté le ).
  4. a b c d e f g h i j k l m n o et p Fernand Garcia, « Un Condé d'Yves Boisset », sur Kinoscript, (consulté le )
  5. a et b https://www.imdb.com/title/tt0066502/trivia
  6. a et b Virgile Dumez, « Un condé : la critique du film et le test blu-ray (1970) », sur cinedweller.com, (consulté le ).
  7. Jean-Marc Oudry, « Test Blu-ray de Un Condé », sur DVDClassik, (consulté le ).
  8. Fabrice BO, « BO France - 13 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  9. Franck P., « Top 30 Hebdo du 7 au 13 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  10. Franck P., « Top 30 Hebdo du 14 au 20 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  11. Fabrice BO, « BO France - 20 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  12. Franck P., « Top 30 Hebdo du 21 au 27 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  13. Fabrice BO, « BO France - 27 octobre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  14. Fabrice BO, « BO France - 10 novembre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  15. Fabrice BO, « BO France - 22 décembre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  16. Fabrice BO, « Box Office Annuel 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  17. Franck P., « Top 30 Hebdo du 23 au 31 décembre 1970 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  18. Fabrice BO, « BO France - 19 janvier 1971 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  19. Fabrice BO, « BO France - 9 février 1971 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  20. Fabrice BO, « Box Office Annuel 1971 », sur Les Archives du Box-office, (consulté le ).
  21. (fr) Jp's Box-office. Consulté le .
  22. « Un condé d'Yves Boisset (1970) », sur php88.free.fr (consulté le )
  23. J.-L. D, « Yves Boisset - Un Condé », sur Le Monde, (consulté le )
  24. « Fiche UN CONDE », sur VHSdb (consulté le ).
  25. « Un Condé (1970) : édition DVD de 2007 », sur DVDfr.com (consulté le ).
  26. « Un Condé (1970) : édition DVD de 2019 », sur DVDfr.com (consulté le ).
  27. « Un Condé (1970) : édition Blu-ray », sur DVDfr.com (consulté le ).
  28. « Un Condé (1970) », sur playtv.fr (consulté le ).
  29. « Film Un Condé sur Arte le lundi 4 octobre à 20h55 », sur Ouest-France (consulté le ).
  30. Christophe Gazzano, « Audiences : "ADP" leader au top, le final d'"Une affaire française" battu par F2, Arte et W9 plus fortes que F3 », sur PureMédias, (consulté le )

Liens externes

Information

Article Un condé en français Wikipedia a pris les places suivantes dans le classement local de popularité:

Le contenu présenté de l'article Wikipédia a été extrait en 2021-10-14 sur la base de https://fr.wikipedia.org/?curid=1820116