Sylvain Tesson est le fils de Philippe Tesson (1928-2023), journaliste et patron de presse, et de Marie-Claude Millet (1942-2014), médecin spécialisée en rhumatologie et en médecine tropicale, qui ont fondé ensemble Le Quotidien du médecin en 1971 puis ce dernier Le Quotidien de Paris en 1974. Sylvain Tesson a deux sœurs : la comédienne Stéphanie Tesson (1969) et la journaliste Daphné Tesson (1978)[1].
En 1991, il découvre l’aventure lors d’une traversée à vélo du désert central d’Islande[9], puis d’une expédition spéléologique à Bornéo[10].
Puis, en 1993-1994, il fait le tour du monde à bicyclette avec Alexandre Poussin, qu’il connaît depuis le lycée[11]. Les deux amis, qui terminent alors leurs études de géographie[10], tirent de leur voyage, en 1996, le livre On a roulé sur la terre, qui leur vaut le prix jeune de l’IGN[9]. Ils contactent à cette occasion Jean Raspail, écrivain, explorateur et vice-consul autoproclamé du Royaume d'Araucanie et de Patagonie[12]. Tesson assume, par ailleurs, d'être « réactionnaire » et fréquenter La Nouvelle Librairie, proche du théoricien de la Nouvelle Droite, Alain de Benoist[13].
En 2001 et 2002, il participe à des expéditions archéologiques au Pakistan et en Afghanistan[9].
De mai 2003 à janvier 2004, il reprend l'itinéraire des évadés du goulag en suivant le récit, à la véracité contestée, de Sławomir Rawicz : The Long Walk (1955)[14]. Il relate ce périple, qui l'emmène de Iakoutsk en Sibérie, puis en Chine où il rejoint le Tibet à vélo[15], où il retrouve l'exploratrice Priscilla Telmon (traversant l'Himalaya à pied) pour parcourir ensemble le Sikkim et gagner Calcutta en Inde à pied, dans son livre L'Axe du loup[16]. Pour lui, l’aventure est plausible dans son ensemble mais comporte des anomalies absolues, comme « dix jours sans boire dans le Gobi »[15].
En 2007, le documentaire Irkoutsk-Pékin, la route des steppes, qu'il réalise avec Nicolas Millet, relate son expédition d’Irkoutsk à Pékin en empruntant la route du Transmongol[17].
L'écrivain
Sylvain Tesson (deuxième à gauche) lors de la réception de Patrice Franceschi comme écrivain de Marine, le 10 février 2014 à l'hôtel de la Marine à Paris.
À l'été 2017, France Inter lui propose de concevoir une série de huit émissions d'une heure chacune, intitulée « Un été avec Homère », lors desquelles il propose sa lecture et son analyse de l’Iliade et de l’Odyssée. Ces émissions donnent lieu l'année suivante à la parution d'un livre homonyme (Un été avec Homère), qui devient l'essai le plus vendu en 2018 — et le sixième livre toutes catégories confondues le plus vendu cette année-là —, selon le palmarès annuel L'Express-RTL-Tite Live (classant les ouvrages francophones parus dans l'année en grand format)[18],[19]. Il est l'auteur le plus vendu en 2019 en France au palmarès des meilleures ventes de livres francophones (hors bandes dessinées) en librairies grâce à son récit La Panthère des neiges[20],[21]. En 2020, le livre passe « la barre faramineuse des 500 000 exemplaires »[22].
France Inter lui propose à nouveau, à l'été 2020, de concevoir une série de quarante capsules de quatre minutes chacune intitulée « Un été avec Rimbaud », lors desquelles il propose sa lecture et son analyse de l'œuvre d'Arthur Rimbaud[23],[24].
Le « stégophile »
Sylvain Tesson est « stégophile » depuis son adolescence[25] — il a emprunté ce néologisme synonyme du plus courant « toiturophile » à l'écrivain Sylvain Jouty qui nomme l'activité consistant à monter sur les toits, dans son cas essentiellement ceux des cathédrales[26],[27]. Surnommé « le prince des chats » au sein d'un cercle d'acrobates, il passe des nuits entières sur des clochers et des flèches : à Notre-Dame de Paris, au Mont-Saint-Michel, à la basilique Sainte-Clotilde de Paris, et sur d'autres monuments (principalement des églises) à Orléans, Argentan, Reims, Amiens ou encore Anvers[26].
En 2008, il aide Robert Ménard à escalader la façade sud de Notre-Dame pour que celui-ci puisse se cacher sous la toiture en attendant le passage de la flamme olympique. « C'était une manière d'exprimer ma compassion pour la souffrance du peuple tibétain », dira-t-il[28]. Avec Priscilla Telmon, il participe au déploiement de deux banderoles de Reporters sans frontières sur Notre-Dame de Paris, puis avec les alpinistes Christian Clot et Evrard Wendenbaum, depuis le premier étage de la tour Eiffel[29].
L'idée que son écriture est problématique se retrouve chez des auteurs confirmés. Le philosophe et écrivain Bruce Bégout parle en effet d’imposture à propos d’écrivains voyageurs qui fondent leur succès sur des stéréotypes littéraires pittoresques : « Imposteurs (…). Je parlais plutôt d’écrivains comme Sylvain Tesson qui, à mon sens, reproduisent des clichés éculés sur la littérature voyageuse »[35].
C’est ce qui ressort en effet du livre de Guillaume Thouroude sur le récit de voyage contemporain, dont le dernier chapitre oppose deux courants d’écriture : les « nouveaux explorateurs » qui recyclent des poncifs aventuriers dont Sylvain Tesson serait le chef de file, et qui comptent des figures connues comme Sonia et Alexandre Poussin, ou Sarah Marquis, et de l’autre côté des auteurs plus singuliers et novateurs comme Antonin Potoski, Philippe Vasset ou Bruce Bégout lui-même »[36]. Ce livre reproche à Tesson, notamment, de porter « un regard hautain sur le monde »[36].
Les médias font écho aux tendances réactionnaires de Sylvain Tesson, comme L'Express qui le dépeint comme une « icône réac »[37] ou encore comme un « nouveau visage de la droite anti-moderne »[22]. Pour Jean-Xavier Ridon, ses livres dévoilent, sous une apparence humaniste, une idéologie « néocolonialiste » qui essentialise les populations rencontrées avec des « généralités constantes sur les Russes et l’esprit slave »[38], une attitude « qui n’est pas sans rappeler ce que l’orientalisme fut en son temps ». Celui-ci voit dans l’écriture de Tesson un manque d’authenticité : mise en scène de la solitude et du danger alors qu’il voit dans le séjour de Tesson « le choix d’un voyageur occidental qui a la chance d’expérimenter un mode de vie autre »[38].
Publications
« Il y avait ce tableau de Bernard-Édouard Swebach […] On y voyait un cuirassier assis sur la croupe de son cheval couché. L'homme avait l'air désespéré. Il regardait ses bottes. Il savait qu'il n'irait pas plus loin. Dans son dos, une colonne de malheureux traînant, à l'horizon. Mais c'était le cheval qui frappait. Il reposait sur le verglas. Il était mourant — peut-être déjà mort. Sa tête était couchée délicatement sur la neige. Son corps était une réprobation : Pourquoi m'avez-vous conduit ici ? Vous autres, Hommes, avez failli, car aucune de vos guerres n'est celle des bêtes ». Berezina, p. 153.
2009 : Haute Tension : des chasseurs alpins en Afghanistan (photographies de Thomas Goisque et illustrations de Bertrand de Miollis), éditions Gallimard
2012 : Sibérie ma chérie (photographies de Thomas Goisque et illustrations de Bertrand de Miollis), éditions Gallimard loisirs
2022 : Prix Paulée de Meursault pour l'ensemble de son œuvre, récompense de 100 bouteilles de vin de Meursault offertes par le domaine Michel Bouzereau et Fils[47].
↑François Aubel, « L'écriture, une histoire de famille - Philippe et Sylvain Tesson - La folie des hauteurs », Le Figaro, mercredi 30 juillet 2014, page 18.
↑Sylvain Tesson, présentation de l'auteur sur le site des Éditions Arthaud : « Géographe de formation […]. Sylvain Tesson obtient en 1996 un DEA de géopolitique (La Guerre de l'eau en Israël, directeur Yves Lacoste). »
↑En français, À marche forcée, paru aux Éditions Phébus, Libretto, 2011.
↑ a et bSylvain Tesson, Les Chemins de la liberté, Retour d’expé, sur le site expemag.com, 16 avril 2004, p. 45 : « La vérité de tout ou partie de ce récit a été souvent contestée […]. Selon lui, l’aventure est plausible dans son ensemble mais comporte des anomalies absolues, comme « 10 jours sans boire dans le Gobi ». »
↑Philibert Humm, « Opération Lupin », Le Figaro Magazine, 2 octobre 2020, p. 59-60.
↑Liouba Bischoff (dir.), Voyager en philosophe. De Friedrich Nietzsche à Bruce Bégout, Paris, Kimé, , 260 p. (ISBN2380720118), p. 237
↑ a et bGuillaume Thouroude, La Pluralité des mondes. Le récit de voyage de 1945 à nos jours, Paris, Sorbonne Université Presses, Coll. "Imago Mundi", , 300 p. (ISBN979-1023105056), p. 235
↑ a et bJean-Xavier Ridon, « Sylvain Tesson, de l’extrême comme nostalgie conquérante », La Revue des lettres modernes, coll. « Voyages contemporains », 2, , p. 65-78
↑Pour un compte-rendu critique, voir Pierre Sauzeau, Un été avec Homère, in : Actualités des études anciennes, 19 juillet 2018.