Survivalisme

Couverture du Survival Under Atomic Attack (en), une publication officielle du gouvernement des États-Unis (Executive Office of the President, National Security Resources Board et Civil Defense Office) de 1950.

Le survivalisme est un terme qui désigne les activités de certains individus ou groupes d'individus qui se préparent à une catastrophe éventuelle (catastrophe naturelle, crise économique, crise sanitaire, etc.) à l'échelle locale ou globale, voire à un événement potentiellement cataclysmique (effondrement écologique, guerre nucléaire, invasion extraterrestre, etc.), ou plus généralement à un effondrement de la civilisation industrielle.

Les survivalistes se préparent en apprenant des techniques de survie et des rudiments de notions médicales, en stockant de la nourriture et des armes, en construisant des abris antiatomiques, ou en apprenant certaines techniques de bushcraft afin de s'abriter, se réchauffer, avoir de l'eau potable et se nourrir en milieu sauvage ou hostile (chasse, cueillette, production de feu).

Le mouvement émerge aux États-Unis dans les années 1960, sur fond de guerre froide. Il a plus récemment évolué en néosurvivalisme, qui est davantage un mouvement porté sur l'autonomie et l'indépendance par rapport au système économique global, et sur une plus grande proximité avec la nature[1].

Origines et historique

Chronologie

En 1902, l'officier de marine Georges Hébert coordonna le sauvetage de 700 personnes d'une éruption volcanique. Profondément affecté par cette expérience, il développa l'hébertisme, une activité physique qui permettrait d'« Être fort pour être utile » afin de survivre.

Dans les années 1960 aux États-Unis, l'inflation et la dévaluation ont incité certaines personnalités à conseiller aux populations de se préparer. En 1967, un architecte, Don Stephens (en) commença à populariser l'idée d'un nécessaire de survie.

Au cours des années 1970, au début de la crise pétrolière de 1973, un livre du conseiller financier Howard Ruff (en), Famine et survie en Amérique, diffusait l'information que différents métaux précieux, dont l'or, avaient plus de valeur et devaient être favorisés dans le cas d'un imminent effondrement économique.

De nombreux livres de « survie » furent publiés à la suite de celui-ci, dont celui de Kurt Saxon (en) qui décrivait les méthodes des pionniers du XIXe siècle. C'est Saxon qui utilisa le terme « survivaliste » le premier et qui prétend l'avoir inventé[2]. Par la suite, des auteurs comme Mel Tappan (en) (qui publia entre autres le bulletin « Personal Survival Letter » de 1977 à 1982) publièrent des ouvrages sur le même thème.

Dans les années 1980, l'auteur et commentateur politique de tendance libertarien John Pugsley (en) publie La Stratégie Alpha (Alpha Strategy: The Ultimate Plan of Financial Self-Defense for the Small Investor.)[3], qui devient un best-seller et est considéré encore aujourd'hui comme une référence parmi les survivalistes américains[4],[5]. À la même période, où voit se dérouler la course aux armements nucléaires entre les deux blocs, paraît le livre Life After Doomsday: A Survivalist Guide to Nuclear War and Other Major Disasters (1980) de Bruce D. Clayton (en).

Dans les années 1990, le mythe du « bogue de l'an 2000 » redonne une seconde vie au courant survivaliste.

Dans les années 2000, les événements des attentats du 11 septembre 2001 et la guerre contre le terrorisme ravivent également la crainte d'un désastre imminent, comme imaginé dans les années 1960 et 1970. La crise financière de 2007-2009 poursuit le phénomène, ainsi que les catastrophes naturelles qui suivent (par exemple, les tempêtes de décembre 1999 en Europe, le séisme de 2004 dans l'océan Indien, la tempête Xynthia en 2010, etc.).

Inspirations religieuses

Le survivalisme est parfois lié à des croyances religieuses diverses, il s'est développé dans les pays protestants où l'eschatologie est très présente et où le public apprécie les romans et les films ayant pour thème une grande catastrophe de fin du monde.

Bien que les Églises évangéliques intègrent dans leur prédication le temps de la « grande tribulation » et la nécessité de s'y préparer, ceci n'a rien à voir avec la notion de survivalisme. Aucune notion de préparation physique n'est promulguée. L'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours donne consigne aux familles de stocker de la nourriture[6]. La prédiction d'un changement radical en décembre 2012, issue d'une interprétation du calendrier maya, a ravivé également les préparatifs des survivalistes religieux[7]. Plus généralement, cette peur d'une grande catastrophe est celle de la peur de la mort.

Néosurvivalistes (preppers)

Plus récemment, le besoin d'être simplement prévoyant de la part de certains individus[8] ainsi que de se distancier des connotations sectaires, extrémistes[9], et/ou ultra-individualistes[10] collant au survivalisme, en particulier aux États-Unis, a donné naissance au terme « prepper »[11] (de prepping[12] : diminutif informel de « se préparer »).

Les néosurvivalistes, craignant des rapports officiels qui sont de plus en plus angoissants, pour rester dans l'idée du « Teotwawki » (« the end of the world as we know it », en français « la fin du monde tel que nous le connaissons »), préfèrent se baser sur la culture populaire comme le cinéma, la littérature, la télévision ou le jeu vidéo[13].

Ainsi, des réseaux de preppers ont vu le jour au Canada et aux États-Unis (comme l'American Preppers Network[14]) pendant la guerre froide (à l'origine). Ces développements ont conduit Gerald Celente, le fondateur du « Trends Research Institute » à relever l'émergence de ce qu'il appelle le « néosurvivalisme ». En , il définit ce phénomène dans une interview accordée à Jim Puplava (en) :

« [dans] les années '70, la seule chose que l'on voyait était un seul élément du survivalisme : la caricature, le gars avec son AK-47, se dirigeant vers les collines avec assez de munitions, de porc et de haricots pour traverser la tempête. Le néosurvivalisme est très différent de ça. On observe des citoyens ordinaires, prenant des initiatives ingénieuses, se diriger dans un sens intelligent afin de se préparer au pire. […] Il s'agit donc d'un survivalisme de toutes les façons possibles : se cultiver soi-même, être auto-suffisant, faire autant que possible pour se débrouiller aussi bien que possible par soi-même. Et cela peut se faire dans des zones urbaines, semi-urbaines ou à la campagne. Cela veut dire également : devenir de plus en plus solidement engagé avec ses voisins, son quartier. Travailler ensemble et comprendre que nous sommes tous dans le même bain. Le meilleur moyen d'avancer c'est en s'aidant mutuellement.[…][15] »

Selon une étude du sociologue Bertrand Vidal[16], une évolution du survivalisme s'est bien produite au début du XXIe siècle :

« Si au départ l’on pouvait dire qu’il existe une unique population survivaliste qui pouvait se définir racialement, politiquement, économiquement et autres, aujourd’hui le mouvement est protéiforme, multiple, trans-générationnel. Tout le monde peut, un jour, devenir survivaliste. »

« Le "prepper", s’il ne diffère pas du survivaliste quant aux pratiques mises en œuvre pour la survie […], la préparation au pire, se présente plutôt comme un mode de vie, une attitude quotidienne que comme un moyen de survie. »

Principes

Types de problèmes envisagés

Vue idéalisée de l'intérieur d'un abri antiatomique (1957) où l'humanité devait continuer à vivre malgré les retombées dans l'environnement.

Le survivaliste se prépare en fonction de la situation anticipée.

La préparation la plus importante est celle pour un événement qui touche personnellement les individus, comme :

  • un accident (de la route, domestique) ;
  • un incendie au domicile ;
  • un cambriolage ;
  • une agression ;
  • une situation d'isolement dans la nature : le canadien Les Stroud, parfois qualifié d'expert survivaliste[17], en est le représentant canadien le plus médiatisé.

Ensuite, viennent les événements locaux, touchant une zone limitée, par exemple des suites du mauvais temps ou de troubles sociaux :

Enfin, viennent les événements à échelle régionale, nationale ou mondiale. Lors de ces événements, chaque individu est livré à lui-même :

Pour résumer tout cela, se protéger contre une épidémie de type « zombie » est une métaphore courante. Ce type de catastrophe fictive rassemble presque tous les risques possibles.

Préparatifs

Un kit de préparation « prêt à l'emploi » de la Croix-Rouge américaine.

Les préparatifs courants comprennent la création d'un lieu de retraite clandestin ou défendable, d'un refuge en plus du stockage de nourriture non périssable, d'eau, d'équipement de purification de l'eau, de vêtements, de semences, de bois de chauffage, d'armes de défense ou de chasse, de munitions, de matériel agricole et de fournitures médicales. Certains survivants ne se préparent pas de façon aussi poussée et intègrent simplement un point de vue « Soyez prêt » dans leur vie de tous les jours.

Il est possible de créer un sac d'équipement, souvent appelé sac d'évacuation (BOB) ou « sac d'esquive » (get out of dodge ou GOOD)[18], qui contient les nécessités de base et des articles utiles. Il peut être de n'importe quelle taille, pesant autant que l'utilisateur est capable de transporter.

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Solutions développées

  • Compétences de survie (maîtrise du feu, nœudsetc.), et d'autosuffisance.
  • Élaboration de kits de survie (sac d'évacuation, EDC, kit voiture, trousse de secours).
  • Élaboration d'une stratégie financière d'urgence (stockage de lingots d'or, d'argent et de matières premières comme des lingots de cuivre).
  • Mise en place d'une base autonome durable (BAD) qui doit comporter une réserve et un approvisionnement en eau potable, en nourriture, en énergie, en soins, en défense, en distraction, en informations et en relations humaines. Sa surface doit donc être assez grande pour cultiver des produits agricoles et élever des animaux ou de la volaille. Des évacuations (sortie de secours, ordures, excréments, urines...) sont indispensables.

Dans le monde

La préparation survivaliste, individuelle ou en groupe, qu'elle soit formelle ou informelle, ainsi que les forums et blogs dédiés, sont populaires dans le monde. Ils sont les plus visibles en Australie[19],[20], Autriche[21], Belgique[22], Canada[23], France[24],[25],[26],[27],[28], Allemagne[29] (souvent sous l'appellation de clubs de sports extrêmes)[30], Pays-Bas[31], Nouvelle-Zélande[32], Russie[33], Suède[34],[35],[36], Royaume-Uni[37] et surtout aux États-Unis[10],[11].

En Europe, de façon plus générale, le survivalisme se rapproche davantage du concept d'autosuffisance que de prepping et d'apocalypse. On y traite bien sûr de la survie en milieu rural ou urbain et des premiers soins, mais également de la permaculture, des énergies vertes, de la conception d'habitats durables ainsi que de météo en plus du prepping.

La perception du survivalisme en France

En France, selon les survivalistes, les médias tournent le survivalisme en ridicule et réduisent ses pratiquants à des paranoïaques. De plus, la société non-survivaliste voit le survivalisme comme une « curiosité spectaculaire », une façon de sortir de sa routine. C'est d'ailleurs pour cela qu'elle apprécie des émissions de télé-réalité telles que Man vs. Wild[25].

Lors de l'affaire Mia, quatre hommes, suspectés d'être les complices de la mère dans l'enlèvement de sa petite fille dont la garde lui avait été retirée, sont présentés par les enquêteurs comme appartenant à la mouvance survivaliste et seraient proches de l’ultra-droite[38].

Dans la culture populaire

Littérature

Cinéma

Télévision

Diverses émissions, de type documentaire ou jeu télévisé, mettent en scène des conditions de survie. Par exemple :

Documentaires et jeux télévisés
Séries télévisées

Bande dessinée

Dans la fiction

La survie est un thème récurrent dans la fiction en général, en particulier dans certains genre comme la science-fiction post-apocalyptique, ou les films de zombies.

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Survivalism » (voir la liste des auteurs).
  1. « Le survivalisme se modernise-t-il ? », sur France Culture.fr, .
  2. (en) Kurt Saxon, « What is a survivalist? », sur textfiles.com (consulté le 7 octobre 2012).
  3. (en) Fiche du livre sur goodreads.com (consulté le 12 septembre 2020).
  4. (en) James Wesley, « Time For Retreat Logistics Stage Two--The Soft Items », sur survivalblog.com, .
  5. (en) James Wesley, « Coping With Inflation--Some Strategies for Investing, Bartering, Dickering, and Survival », sur survivalblog.com, .
  6. « Réserves au foyer », sur lds.org (consulté le 7 octobre 2012)
  7. « 2012 : ils ont peur de l'apocalypse », sur m6.fr, (consulté le 7 octobre 2012)
  8. (en) Kari Huus, « Hard times have some flirting with survivalism », sur msnbc.msn.com, .
  9. (en) Ben Brown, « Prepping Basics: How To Start Prepping In Five Steps »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur https://thepreppingguide.com/prepping-basics/, .
  10. a et b (en) Alex Williams, « Duck and Cover: It’s the New Survivalism », sur nytimes.com, .
  11. a b et c Valérie de Graffenried, « Des survivalistes nichés dans la Silicon Valley », Le temps, 4 octobre 2018 (page consultée le 4 octobre 2018).
  12. (en) « prep », sur thefreedictionary.com (consulté le 7 octobre 2012).
  13. Bertrand Vidal, « Le survivalisme, ou la civilisation en procès », sur scienceshumaines.com (consulté le 13 octobre 2020).
  14. (en) « American Preppers Network », sur americanprepperswork.com (consulté le 7 octobre 2012)
  15. (en) Gerald Celente, dans Jim Puplava (en), « Gerald Celente, on MF Global, Fascism, and the Culture of Corruption », Financial Sense, décembrre 2009.
  16. Bertrand Vidal, « Survivre au désastre et se préparer au pire », sur lodel.irevues.inist.fr (consulté le 7 octobre 2012).
  17. (en) Jeremy Derksen, « Essential Skills and tactics to get You out of Anywhere – Alive », Sarscène, vol. 18, no 3,‎ , p. 19 (lire en ligne [PDF]).
  18. « Glossary », Survivalblog.com (consulté le 13 août 2010)
  19. (en) Tim Elliott, « Survivalists stock up ready for the worst », The Sydney Morning Herald,‎ (lire en ligne).
  20. (en) « Head for the hills - the new survivalists »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Energy Bulletin (consulté le 13 août 2010).
  21. « http://www.preppers.at »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le 1er août 2017).
  22. (en) « Survivalisme Belgique ».
  23. (en) The Gazette, « Survivalist Cuisine: Apocalypse grade tomatoes », Canada.com, (consulté le 13 août 2010).
  24. (en) « Olduvaï - anticipation & gestion des risques », Le-projet-olduvai.kanak.fr, (consulté le 13 août 2010).
  25. a et b Légendat, « le survivalisme en France », sur resilience-urbaine.com, .
  26. (en) « Le survivaliste ».
  27. « La Bible du Survivalisme », sur La Bible du Survivalisme (consulté le 21 avril 2015).
  28. « Parlons Survivalisme », sur Parlons Survivalisme (consulté le 7 avril 2018)
  29. (en) Bojan Pancevski, « Bunkers in vogue as cold war fears rise », The Daily Telegraph, London,‎ (lire en ligne, consulté le 9 avril 2010).
  30. (en) « Open Directory - World: Deutsch: Freizeit: Outdoor: Survival », Dmoz.org (consulté le 27 janvier 2012)
  31. (en) « Preppers.nl », Preppers.nl, (consulté le 2 juillet 2012).
  32. (en) « The New Zealand Preparedness Forum - Home », Nzpreppers.proboards60.com (consulté le 13 août 2010).
  33. (en) « Survivalists stock up for End of Days - RT Top Stories »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Russiatoday.com (consulté le 13 août 2010).
  34. (en) « Blott Sverige svenska preppers har », Innandetsker.blogspot.com, (consulté le 13 août 2010)
  35. (en) « Survivalist.se », survivalist.se, (consulté le 19 septembre 2010).
  36. (en) « Swedishurvivalist.se - Forum », swedishsurvivalist.se, (consulté le 19 septembre 2010).
  37. (en) « Survivalists get ready for meltdown », CNN,‎ (lire en ligne, consulté le 9 avril 2010).
  38. Site actu.fr, article d'Antony Speciale "Enlèvement de Mia dans les Vosges : les quatre suspects présentés à un juge d'instruction", consulté le 17 avril 2021
  39. « Alone, les survivants : l'aventure extrême sur D17 », Gilles Boussaingault, Le Figaro.fr, 10 novembre 2015.

Voir aussi

Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Survivalisme.

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Bibliographie

Articles connexes

Affaire judiciaire
  • Affaire Mia
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