Protocole de Minsk

Carte de la zone tampon établie par le mémorandum de suivi du Protocole de Minsk

Le protocole de Minsk est un accord signé le par les représentants de l'Ukraine, de la Russie, de la république populaire de Donetsk (DNR) et de la république populaire de Lougansk (LNR) pour mettre fin à la guerre en Ukraine orientale[1],[2],[3]. Il a été signé après de longues négociations à Minsk, capitale de la Biélorussie, sous les auspices de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L'accord, qui fait suite à plusieurs tentatives pour faire cesser les combats dans la région du Donbass, en Ukraine orientale, a mis en œuvre un cessez-le-feu immédiat. Cependant, l'accord a échoué dans son objectif de faire cesser tous les combats dans l'Est de l'Ukraine[4].

Processus et rédaction du protocole

L'accord a été formulé par le groupe de contact trilatéral sur l'Ukraine, composé des représentants de l'Ukraine, de la Russie et de l'OSCE[5]. Le groupe a été créé en comme un moyen de faciliter le dialogue et la résolution des conflits dans l'Est et le Sud-Est de l'Ukraine. Les réunions du groupe avec des représentants informels des républiques populaires sécessionnistes de Donetsk et de Lougansk, ont eu lieu les , , et . Les détails de l'accord signé le ressemblent largement au plan de paix en quinze points proposé par le président ukrainien Petro Porochenko le . Les représentants suivants ont signé le document[6] :

Texte du protocole

Le texte du protocole comprend douze points[7]:

  1. Assurer un cessez-le-feu bilatéral immédiat ;
  2. Assurer la surveillance et la vérification du cessez-le-feu par l'OSCE ;
  3. Organiser une décentralisation des pouvoirs, par la mise en application d'une loi ukrainienne (loi sur le statut particulier), accordant de manière temporaire l'autonomie locale dans les oblasts de Donetsk et de Lougansk ;
  4. Assurer une surveillance permanente de la frontière russo-ukrainienne par l'OSCE et instaurer une zone de sécurité à cette même frontière ;
  5. Libérer immédiatement tous les otages et les personnes retenues illégalement ;
  6. Adopter une loi ukrainienne visant à interdire les poursuites et les sanctions contre toutes les personnes impliquées dans la guerre du Donbass ;
  7. Poursuivre un dialogue national entre les parties ;
  8. Mettre en œuvre des mesures afin d'améliorer la situation humanitaire dans le Donbass ;
  9. Procéder à des élections anticipées dans les oblasts de Donetsk et de Lougansk ;
  10. Procéder au retrait du territoire ukrainien des formations armées et du matériel militaire illicites, ainsi que des combattants irréguliers et des mercenaires ;
  11. Mettre en place un programme économique pour favoriser la reprise des activités et de l'économie locale dans le Donbass ;
  12. Assurer la protection personnelle des participants aux consultations.

Mémorandum de suivi

Au cours des deux semaines qui suivent la signature du protocole de Minsk, des violations du cessez-le-feu sont fréquentes de la part des deux parties au conflit[8],[9]. Les discussions se poursuivent à Minsk. Un suivi du protocole de Minsk est convenu le . Le mémo résultant clarifie l'application du protocole. Parmi les mesures convenues à la paix, figurent notamment[8],[10],[11] :

  • suppression de toutes les armes lourdes dans une zone de quinze kilomètres derrière la ligne de contact, par chaque partie du conflit, afin de créer une zone démilitarisée de trente kilomètres de large en tout ;
  • interdiction d'opérations offensives ;
  • interdiction des vols d’avions de combat au-dessus de la zone de sécurité ;
  • retrait de tous les mercenaires étrangers de la zone de conflit ;
  • mise en place d'une mission de l'OSCE pour surveiller la mise en œuvre du protocole de Minsk.

Le , les membres du groupe de contact trilatéral sur l'Ukraine se réunissent à nouveau pour discuter de la délimitation de la zone tampon, dans laquelle les armes lourdes seraient bannies par les parties au conflit[12]. La ligne de démarcation entre la RPD et l'Ukraine est convenue entre les représentants de la RPD et les négociateurs ukrainiens, selon le vice-Premier ministre d’Ukraine, Vitali Yarema[13]. Le , le Parlement ukrainien modifie unilatéralement la « loi sur le statut spécial », proposée dans le cadre du protocole de Minsk, alors qu'il avait approuvé certains aspects de celle-ci[14].

Efficacité

Après la signature du protocole, au matin du , les combattants du régiment Azov mentionnent l’attaque du village de Chyrokino par des militants séparatistes munis de véhicules blindés[15].

La deuxième bataille pour l'aéroport international de Donetsk éclate[Quand ?] et les deux parties s’accusent mutuellement de violations continues du cessez-le-feu. L'aéroport international de Donetsk était fermé à tout trafic aérien depuis le , en raison des combats entre les forces du nouveau gouvernement ukrainien et les séparatistes pro-russes[4]. À la fin , le Premier ministre de la république populaire de Donetsk (RPD), négociateur et signataire du protocole de Minsk, Alexandre Zakhartchenko, déclare que les forces sous son contrôle vont revenir pour reprendre le territoire qu'elles avaient perdu face aux forces du gouvernement ukrainien lors de l'offensive de et que les forces de la RPD seront prêtes à se battre dans des combats à l'arme lourde pour l’atteinte de leurs objectifs[4],[16]. Le lendemain, Zakhartchenko déclare qu'il a été mal compris, et qu'il a voulu dire que ces zones seraient reprises par des « moyens pacifiques »[17]. Lors de sa campagne pour les élections générales dans le Donbass menées par la DNR et la LNR, en violation alléguée du Protocole de Minsk, Zakhartchenko a déclaré : « Ce sont des moments historiques », « Nous sommes en train de créer un nouveau pays ! C'est un but fou »[18]. Le président de l'OSCE, Didier Burkhalter, a confirmé que les élections étaient « contraires à la lettre et à l'esprit du Protocole de Minsk » et qu'elles « compliqueraient davantage sa mise en œuvre »[19].

S'exprimant le , le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, affirme que les élections générales de la république populaire de Donetsk (RPD) et celles de la république populaire de Lougansk (RPL), ayant eu lieu le , rentraient « exactement dans les prévisions des accords de Minsk », et que le parlement ukrainien aurait dû voter une loi d'amnistie envers les dirigeants de la DNR et de la LNR après les élections législatives en Ukraine en [20]. Selon Lavrov, une surveillance plus étroite de la frontière russo-ukrainienne, comme spécifié dans le Protocole de Minsk, ne pourrait avoir lieu avant qu'une telle loi d'amnistie soit approuvée[20]. Il a dit qu'il avait pensé qu'un décret présidentiel publié le , qui aurait prétendument interdit la persécution des combattants séparatistes dans le Donbass, serait respecté par le gouvernement ukrainien, mais a dit aussi qu'un « projet de loi a été introduit proposant l'annulation de ce décret »[20].

Une étape suivante des pourparlers de paix tenus à Minsk a été suspendue le . Toutefois, les deux parties ont confirmé que, après des heures de négociations, elles ont accepté d'échanger des prisonniers, impliquant au moins 375 prisonniers des deux côtés[21].

Accords de Minsk II

Les accords de Minsk II, du , sont signés selon le format Normandie (Hollande, Merkel, Porochenko, Poutine, avec des représentants des rebelles) et mettent en place un nouveau cessez-le-feu.

Fin des accords

En selon l'agence de presse russe Tass, le chef d'état-major général des forces armées russes Valéri Guérassimov estime que « la livraison d'hélicoptères, de drones et d'avions à l'Ukraine entraînent les autorités ukrainiennes vers un chemin abrupt et dangereux. Kiev ne respecte pas les accords de Minsk. Les forces armées ukrainiennes "se vantent" d'avoir commencé à utiliser des systèmes de missiles antichars Javelin fournis par les États-Unis dans le Donbass et utilisent également des drones de reconnaissance et de frappe turcs. En conséquence, la situation déjà tendue dans l'Est de ce pays se détériore de plus en plus[22] ».

En , Oleksiy Danilov, secrétaire du Conseil de sécurité nationale et de défense de l'Ukraine, affirme que « le respect des accords de Minsk signifie la destruction du pays. Lorsqu'ils ont été signés sous la menace armée des Russes – et sous le regard des Allemands et des Français – il était déjà clair pour toutes les personnes rationnelles qu'il était impossible de mettre en application ces documents »[23].

Début , le président finlandais Sauli Niinistö déclare que « la solution la plus possible [à la situation actuelle] pourrait être que l'accord de Minsk soit respecté ou qu'il y ait des progrès significatifs dans sa mise en œuvre »[24], après ses échanges approfondis avec les chefs d'États russe et ukrainien, le président Macron arrive à la même conclusion : « les accords de Minsk sont la meilleure chance de protection de l'Ukraine »[25].

Le , la Douma russe vote une demande au président Poutine de reconnaître les républiques autoproclamées de l’Est de l’Ukraine[26]. Le lendemain, un porte-parole du gouvernement russe confirme qu’une reconnaissance des républiques du Donbass ne serait pas conforme aux accords, ce que le chef de la diplomatie américaine confirme : cela « représenterait un rejet global par le gouvernement russe de ses engagements conformes aux accords de Minsk »[27]. Cependant, le gouvernement russe déclare que la priorité du président Poutine dans la régulation de la situation dans le Donbass demeure la mise en œuvre des mécanismes d’autonomisation prévus dans le cadre de ces accords[28]. La Russie reconnait officiellement les républiques populaires autoproclamées de Louhansk et de Donetsk le 21 février 2022, ce qui met fin au protocole élaboré avec le concours de la France et de l'Allemagne [29]. À la suite de cette décision, le , le président Poutine déclare que les accords de Minsk « n'existent plus » et que l'Ukraine, et non la Russie, est à blâmer pour leur effondrement.[réf. nécessaire]

Le , Vladimir Poutine ordonne l'invasion de l'Ukraine alléguant le non respect de ces accords par l'Ukraine, afin de démilitariser la zone.

Notes et références

  1. (en) « Ukraine ceasefire agreement signed in Minsk (Accord de cessez le feu en Ukraine signé à Minsk) », sur CCTV America - cctv-america.com, CCTV America,
  2. (en) « Chairperson-in-Office welcomes Minsk agreement, assures President Poroshenko of OSCE support (Président en exercice se félicite de l'accord de Minsk et assure le soutien de l'OSCE, s'adressant au président Porochenko) », sur osce.org,
  3. (en) « OSCE Chief Monitor in Ukraine urges all sides to allow monitors to carry out duties safely (Moniteur chef de l'OSCE en Ukraine exhorte toutes les parties à permettre à des observateurs d'exercer leurs fonctions en toute sécurité) », sur osce.org,
  4. a b et c (en) « Ukraine rebels vow to take back cities (Rebelles de l'Ukraine promettent de reprendre des villes) », sur Sky News skyneus.com.au, Sky News,
  5. « Press statement by the Trilateral Contact Group (Déclaration à la presse par le Groupe de contact trilatérale) », sur osce.org,
  6. (ru) « Protocole de Minsk »,
  7. [PDF]Relevé de conclusions des consultations du Groupe de contact tripartite relatives aux mesures conjointes destinées à mettre en œuvre le Plan de paix du Président de l’Ukraine P. Porochenko et les initiatives du Président russe V. Poutine, delegfrance-osce, 28 octobre 2014
  8. a et b (en) « Ukraine deal with pro-Russian rebels at Minsk talks (L'accord sur l'Ukraine avec les rebelles pro-russes de dans les négociations à Minsk) », sur BBC News bbc.com, BBC News,
  9. (en) « Ukrainian peace talks lead to buffer zone deal (Les pourparlers de paix en Ukraine aboutissent à un accord sur une zone démilitarisée) », sur CBC News cbc.ca, CBC News,
  10. « Nato top general says truce 'in name only' » [« Un haut général de l'OTAN parle d'une trêve "qui n'existe que sur le papier" »], (consulté le )
  11. (ru) « Memorandum of 19 September 2014 outlining the parameters for the implementation of commitments of the Minsk Protocol (Mémorandum du 19 septembre 2014 décrivant les paramètres pour la mise en œuvre des engagements du Protocole de Minsk) »,
  12. (en) « Ukraine, Russia and OSCE were engaged in delimitation of a buffer zone on Donbass (Ukraine, la Russie et l'OSCE ont été engagés dans la délimitation d'une zone tampon sur Donbass (Ukraine, la Russie et l'OSCE ont été engagés dans la délimitation d'une zone tampon sur Donbass) », sur news.pn/en/, Prestupnosti.net,
  13. (en) « Donetsk Republic agrees with Ukraine on demarcation line - deputy PM » [« La république de Donetsk est d'accord sur une ligne de démarcation avec l'Ukraine, d'après le premier vice-Premier ministre [Ravil Khalikov] »], sur tass.com, (consulté le )
  14. (en) « A new draft law on amending the law on the special status of some areas of the Donetsk and Lugansk regions is introduced in the parliament. The document specified districts and locations where to establish a special status; all of them are now under control of LPR and DPR (Un nouveau projet de loi sur la modification de la loi sur le statut spécial de certaines zones des régions de Donetsk et de Lougansk pénètre dans le parlement. Le document spécifie les districts et les lieux où d'établir un statut spécial; tous sont maintenant sous le contrôle de LNR et le DNR) », sur uacrisis.org,
  15. « Ukraine. La trêve mise à mal par des combats dans le Donbass », sur Courrier international, (consulté le )
  16. (en) « Poroshenko vows Kyiv will recapture militants-controlled areas (Porochenko promet que Kiev reprendra les zones contrôlées par les militants) », sur en.interfax.com.ua,
  17. (en) « Ukraine vote could push the country into chaos » [« Les élections [parlementaires] en Ukraine pourraient conduire le pays au chaos »], sur BBC News bbc.com, BBC News, (consulté le )
  18. (en) « Donetsk People’s Republic campaign reveals shambolic tendencies (La campagne dans la République populaire de Donetsk révèle tendances chaotiques) », sur Financial Times ft.com, Financial Times,
  19. (en) « So-called elections not in line with Minsk Protocol, says OSCE Chair, calling for enhanced efforts and dialogue to implement all commitments (Soi-disant élections ne sont pas en ligne avec le Protocole de Minsk, dit le président de l'OSCE, appelant d'efforts accrus et le dialogue à tous pour mettre en en œuvre tous les engagements) », sur osce.org,
  20. a b et c (en) « Too early to discuss broader monitoring of Ukraine-Russia border - Lavrov (Trop tôt pour discuter de surveillance plus large de la frontière entre l'Ukraine et la Russie - Lavrov) »,
  21. « Ukraine Peace Negotiations Canceled in Minsk (Les pourparlers de paix sur l'Ukraine décommandés à Minsk) »,
  22. (en) « Moscow to thwart any provocations by Kiev in Donbass, Russian military chief warns », Tass, (consulté le ) : « "The deliveries of helicopters, unmanned aerial vehicles and aircraft to Ukraine are pushing the Ukrainian authorities towards abrupt and dangerous steps. Kiev is not fulfilling the Minsk Agreements. The Ukrainian armed forces are touting that they have started to employ US-supplied Javelin anti-tank missile systems in Donbass and are also using Turkish reconnaissance/strike drones. As a result, the already tense situation in the east of that country is further deteriorating," Russia’s military chief noted. ».
  23. (en) « Ukraine security chief: Minsk peace deal may create chaos », Associated Press, (consulté le ).
  24. (en) Reuters, « Finland's president says Minsk agreement should be looked at again », Reuters,‎ (lire en ligne, consulté le )
  25. « Crise en Ukraine. Ce qu'il faut retenir de la conférence de presse d'Emmanuel Macron », Ouest-France, .
  26. « Ukraine : La Douma demande à Poutine de reconnaître des régions séparatistes du Donbass », La Tribune, (consulté le ).
  27. « Ukraine : Washington dénonce l'appel de la Douma russe à reconnaître l'indépendance des territoires séparatistes », Le Figaro, (consulté le ).
  28. (en) Telewizja Polska S.A, « Russia aware of Minsk Agreements breach by recognising Donetsk, Luhansk », sur tvpworld.com (consulté le )
  29. « Ukraine : Vladimir Poutine reconnaît l'indépendance des territoires séparatistes et ordonne à l’armée d'y « maintenir la paix » », Le Monde, (consulté le ).

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