Prevotella

Prevotella est un genre de bactéries à Gram négatif de la famille des Prevotellaceae.

Les espèces du genre Prevotella font partie du microbiote oral, vaginal et intestinal et sont souvent retrouvées après une infection anaérobie des voies respiratoires. Ces infections incluent la pneumonie d'aspiration, l'abcès pulmonaire, l'empyème pulmonaire, l'otite moyenne chronique et la sinusite. Ils ont été isolés à partir d'abcès et de brûlures à proximité de la bouche, de morsures, de paronychies, d'infections des voies urinaires, d'abcès au cerveau, d'ostéomyélite et de bactériémies associées aux infections des voies respiratoires supérieures. Les espèces du genre Prevotella prédominent dans les maladies parodontales et les abcès parodontaux.

Prevotella et Covid-19

À la suite de la reprise, déformée, d'un post émis la veille[2], par un article mis en ligne le sur le site Israël Magazine, un message a circulé sur les réseaux sociaux faisant état d'une soi-disant découverte sur le lien entre Covid-19 et la bactérie Prevotella[Laquelle ?]. Le , il n'existe aucune publication scientifique sur le sujet[3] et cette hypothèse n'a jamais pu être confirmée. Cette théorie, ainsi que celle qui expliquerait du même coup l'activité d'un antibiotique (l'azithromycine) sur un virus, sont niées par l'INSERM dans son point d'information[4].

Rôle dans le microbiote intestinal

Les recherches sur le microbiote humain montrent qu'après la naissance, l'intestin humain est peu à peu principalement colonisé par deux phylums de bactéries : Firmicutes et Bacteroidetes ; et principalement dominés par les genres Bacteroides et Prevotella, (qui auraient un ancêtre commun)[5].

Formellement, ces deux genres n'ont été différenciés qu'en 1990[6] mais leur classification est encore en cours (ex : Bacteroides melaninogenicus a été reclassé et divisé en Prevotella melaninogenica et Prevotella intermedia[7].

Chez l'Humain, la flore intestinale est dominée soit par le genre Prevotella soit par le genre Bacteroides, ce qui a fait suggérer que ces deux genres seraient, au moins dans une certaine mesure, antagonistes. Une autre hypothèse est que c'est ce que nous mangeons qui favorise l'un ou l'autre de ces genres bactériens. En effet, les analyses de selles montrent le genre Prevotella est plus fréquent dans les régions non-occidentalisées au régime riche en fruits, légumes et racines crus et cuits, alors que dans les pays industrialisés ou là où la viande est consommée en grande quantité, ce sont les bacteroides qui dominent... sauf dans deux cas : chez les végétariens et chez ceux qui suivent un régime méditerranéen (également riches en fruits et légumes).

Conformément, l'analyse génomique de Prevotella copri a montré que cette bactérie ne dispose pas des gènes codant les enzymes dégradant les glycanes de l'hôte, mais qu'elle et génétiquement équipé pour dégrader les glycanes végétaux[5].

En Afrique, 53 % des bactéries intestinales de jeunes enfants du Burkina Faso appartenaient au genre Prevotella, qui est absent chez les enfants européens du même âge[8].

Le régime alimentaire à long terme est connu pour être fortement associé à la composition du microbiote intestinal. Une nourriture riche en protéines et de graisses animales (typiques de l'alimentation occidentale) sélectionne des bactéries Bacteroides, alors qu'un régime riche en fibre et glucides favorise le genre Prevotella[9].

Des Prevotella ont été associées à l'inflammation intestinale. En particulier des populations accrues de P. copri semblent contribuer à une inflammation chronique chez les patients VIH. Un isolat d'espèce unique P. copri CB7 a été utilisé pour différentes études qui ont montré qu'il peut être bénéfique ou nuisible, selon le contexte[5].

Prevotella un genre comprenant une grande diversité d'espèces et pour chaque espèces on observe une grande diversité génétique entre les souches. Une étude récente sur Prevotella chez l'homme a comparé les répertoires de gènes des espèces selon les sites corporels de prélèvement (chez l'homme). Elle confirme un pan-génome ouvert avec une grande diversité du pool de gènes[10]. En plus des différences génétiques et globales propre au microbiote de l'hôte en général, la grande variété génétique de Prevotella rend difficile la prédiction de leur fonction, qui pourraient varier selon les individus et les contextes[5].

Rôle dans le microbiote vaginal

Certaines espèces du genre Prevotella sont aussi des commensaux vaginaux courants. L'augmentation de leur abondance sur la muqueuse vaginale a été associée à la vaginose bactérienne. Prevotella s'est avéré être le groupe bactérien le plus héréditaire du microbiome vaginal. Son abondance a été reliée à l'indice de masse corporelle de la femme, et au contexte hormonal.

Prevotella bivia produit des lipopolysaccharides et de l'ammoniaque qui sont des composantes naturelles du mucus vaginal. Cette bactérie a été associée à la production de cytokines épithéliales, et à une facilitation de la croissance d'autres organismes bactériens associés à la vaginose (ex : Gardnerella vaginalis). On a constaté que ce dernier stimulait à son tour la croissance de P. bivia[11].

Pathogénicité

Dans la bouche  ; Prevotella intermedia et Prevotella nigrescens ont été associés à des maladies parodontales inflammatoires, telles que la gingivite de type gravidique, la gingivite ulcéro-nécrotique aiguë et la parodontite ulcéro-nécrotique chez l'adulte[12]. Avec Porphyromonas gingivalis, elles sont connus comme des bactéries anaérobies à pigmentation noire. Toutes trois ont besoin d'hémine comme source de fer pour leur croissance. Il a été démontré que ces espèces se lient à la lactoferrine qui est libérée avec le contenu des neutrophiles lors de l'inflammation et des saignements chez les patients atteints de parodontite. La lactoferrine inhibe la croissance de P. gingivalis mais pas de certaines Prevotella[13]. Le fer inorganique et les protéines de liaison au fer telles que la transferrine et la lactoferrine ne favorisent pas la croissance de P. intermedia, mais les composés contenant de l'hémine et du fer (ex : hémine, hémoglobine humaine ou bovine, catalase bovine, stimulent la croissance de Prevotella intermedia. La protéine de liaison à l'hémoglobine sur la surface cellulaire de P.intermedia a été décrite[14].

Lien avec la polyarthrite rhumatoïde ? P. copri a été corrélé à l'apparition de la polyarthrite rhumatoïde[15].

Lien avec l'ostéomyélite ?; une prolifération de Prevotella et une réduction de Lactobacillus ont été corrélées avec l'apparition de l'ostéomyélite chez la souris de laboratoire. Si on réduit les Prevotella par un antibiotique adapté, on peut induire une augmentation de Lactobacillus montrant un effet protecteur contre l'ostéomyélite[16].

Agent synergique en cause dans certaines pneumonies ? le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (ou SARM), dont les souches ont sans doutes émergées dans les élevages de porcs et de volailles industriels, traités aux antibiotiques) est devenu une cause croissante et commune de pneumonie parfois sévère. Ce risque semble souvent liée à une mauvaise hygiène bucco-dentaire ou à une parodontite à Prevotella intermedia[17]. Dans un modèle murin de pneumonie (exposé à plusieurs souches cliniques nosocomiales de SARM) : en présence de Prevotella intermedia, les souris survivaient moins bien quand le taux de P. intermedia était élevé, et elles présentaient alors des charges bactériennes plus élevées dans les poumons, et une expression plus élevée de l'α-hémolysine (hla)[17].

Parallèlement les auteurs on montré (in vitro) que l'activité bactéricide des leucocytes polymorphonucléaires contre les souches nosocomiales de SARM était supprimée en présence de Prevotella intermedia, les staphylocoques dorés nosocomiaux proliféraient alors plus facilement dans les poumons. P intermedia semble interagir avec la toxine MRSA d'une manière dépendante de la souche, ce qui pourrait expliquer des variantes de la pathogenèse de la pneumonie sévère à SARM en présence de P intermedia[17].

Liste d'espèces

Selon Catalogue of Life (23 avril 2020)[19] et ITIS (23 avril 2020)[1] :

Selon NCBI (23 avril 2020)[20] :

Notes et références

  1. a et b ITIS, consulté le 23 avril 2020
  2. igaal, « Covid-19 : Pourquoi la piste de la bactérie Prevotella n’est pas une Fake News », sur Club de Mediapart (consulté le 8 novembre 2020)
  3. Florian Gouthière, « Covid-19 : est-il vrai que la bactérie Prevotella joue un rôle dans l'infection ? », sur Libération.fr, (consulté le 22 avril 2020)
  4. INSERM, Fausses informations : Une bactérie à l’origine des formes graves de Covid-19, vraiment ?[1]
  5. a b c et d Ruth E. Ley, « Gut microbiota in 2015: Prevotella in the gut: choose carefully », Nature Reviews. Gastroenterology & Hepatology, vol. 13, no 2,‎ , p. 69–70 (ISSN 1759-5053, PMID 26828918, DOI 10.1038/nrgastro.2016.4, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  6. H. N. Shah et D. M. Collins, « Prevotella, a new genus to include Bacteroides melaninogenicus and related species formerly classified in the genus Bacteroides », International Journal of Systematic Bacteriology, vol. 40, no 2,‎ , p. 205–208 (ISSN 0020-7713, PMID 2223612, DOI 10.1099/00207713-40-2-205, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  7. « Bacteroides Infection: Background, Pathophysiology, Epidemiology », medscape,‎ (lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  8. Carlotta De Filippo, Duccio Cavalieri, Monica Di Paola et Matteo Ramazzotti, « Impact of diet in shaping gut microbiota revealed by a comparative study in children from Europe and rural Africa », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 107, no 33,‎ , p. 14691–14696 (ISSN 1091-6490, PMID 20679230, PMCID 2930426, DOI 10.1073/pnas.1005963107, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  9. Gary D. Wu, Jun Chen, Christian Hoffmann et Kyle Bittinger, « Linking long-term dietary patterns with gut microbial enterotypes », Science (New York, N.Y.), vol. 334, no 6052,‎ , p. 105–108 (ISSN 1095-9203, PMID 21885731, PMCID 3368382, DOI 10.1126/science.1208344, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  10. Vinod Kumar Gupta, Narendrakumar M. Chaudhari, Suchismitha Iskepalli et Chitra Dutta, « Divergences in gene repertoire among the reference Prevotella genomes derived from distinct body sites of human », BMC genomics, vol. 16,‎ , p. 153 (ISSN 1471-2164, PMID 25887946, PMCID 4359502, DOI 10.1186/s12864-015-1350-6, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  11. Tara M. Randis et Adam J. Ratner, « Gardnerella and Prevotella: Co-conspirators in the Pathogenesis of Bacterial Vaginosis », The Journal of Infectious Diseases, vol. 220, no 7,‎ 08 30, 2019, p. 1085–1088 (ISSN 1537-6613, PMID 30715397, PMCID 6736359, DOI 10.1093/infdis/jiy705, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  12. (en) Shoji Tanaka, Mikako Yoshida, Yukio Murakami et Takako Ogiwara, « The Relationship of Prevotella intermedia, Prevotella nigrescensand Prevotella melaninogenica in the Supragingival Plaque of Children, Caries and Oral Malodor », Journal of Clinical Pediatric Dentistry, vol. 32, no 3,‎ , p. 195–200 (ISSN 1053-4628 et 1557-5268, DOI 10.17796/jcpd.32.3.vp657177815618l1, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  13. O. Aguilera, M. T. Andrés, J. Heath et J. F. Fierro, « Evaluation of the antimicrobial effect of lactoferrin on Porphyromonas gingivalis, Prevotella intermedia and Prevotella nigrescens », FEMS immunology and medical microbiology, vol. 21, no 1,‎ , p. 29–36 (ISSN 0928-8244, PMID 9657318, DOI 10.1111/j.1574-695X.1998.tb01146.x, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  14. « Editorial Board », FEMS Microbiology Letters, vol. 70, no 1,‎ , iii (ISSN 0378-1097, DOI 10.1016/0378-1097(90)90091-4, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  15. Jose U. Scher, Andrew Sczesnak, Randy S. Longman et Nicola Segata, « Expansion of intestinal Prevotella copri correlates with enhanced susceptibility to arthritis », eLife, vol. 2,‎ , e01202 (ISSN 2050-084X, PMID 24192039, PMCID 3816614, DOI 10.7554/eLife.01202, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  16. John R. Lukens, Prajwal Gurung, Peter Vogel et Gordon R. Johnson, « Dietary modulation of the microbiome affects autoinflammatory disease », Nature, vol. 516, no 7530,‎ , p. 246–249 (ISSN 1476-4687, PMID 25274309, PMCID 4268032, DOI 10.1038/nature13788, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  17. a b c d et e Yu Yamashita, Kentaro Nagaoka, Hiroki Kimura et Masaru Suzuki, « Pathogenic Effect of Prevotella intermedia on a Mouse Pneumonia Model Due to Methicillin-Resistant Staphylococcus aureus With Up-Regulated α-Hemolysin Expression », Frontiers in Microbiology, vol. 11,‎ , p. 587235 (ISSN 1664-302X, PMID 33117325, PMCID PMC7575765, DOI 10.3389/fmicb.2020.587235, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  18. (en) E. Boakes, A. M. Kearns, M. Ganner et C. Perry, « Distinct Bacteriophages Encoding Panton-Valentine Leukocidin (PVL) among International Methicillin-Resistant Staphylococcus aureus Clones Harboring PVL », Journal of Clinical Microbiology, vol. 49, no 2,‎ , p. 684–692 (ISSN 0095-1137, PMID 21106787, PMCID PMC3043515, DOI 10.1128/JCM.01917-10, lire en ligne, consulté le 10 novembre 2020)
  19. Roskov Y., Ower G., Orrell T., Nicolson D., Bailly N., Kirk P.M., Bourgoin T., DeWalt R.E., Decock W., van Nieukerken E.J., Penev L. (eds.) (2020). Species 2000 & ITIS Catalogue of Life, 2020-12-01. Digital resource at www.catalogueoflife.org. Species 2000: Naturalis, Leiden, the Netherlands. ISSN 2405-8858, consulté le 23 avril 2020
  20. NCBI, consulté le 23 avril 2020

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