Président Liberté pour l'histoire | |
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Fauteuil 27 de l'Académie française |
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Anne Sinclair Françoise Cachin (de à ) |
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Pierre Nora, né le dans le 8e arrondissement de Paris, est un historien français, membre de l'Académie française, connu pour ses travaux sur le « sentiment national » et sa composante mémorielle, sur le métier d'historien, ainsi que pour son rôle dans l'édition en sciences sociales. Son nom est associé à la Nouvelle Histoire.
Juif ashkénaze[1], Pierre Nora est le fils du médecin Gaston Nora et de Julie Lehman, et le frère du haut-fonctionnaire Simon Nora. Durant la Seconde Guerre mondiale, son père qui a sauvé la vie de Xavier Vallat durant la Première Guerre mondiale reste à Paris[2], tandis que les autres vont se réfugier en zone libre à Grenoble, puis dans un collège à Villard-de-Lans[3]. Il doit finalement fuir pour échapper à la Gestapo[4]. En 1944, la famille est de retour à Paris [5]. De 1964 à 1976, il a été l'époux de l'historienne de l'art et conservatrice de musée Françoise Cachin, décédée en 2011[6]. Il a un fils, Elphège, avec son éditrice Josyane Magniant[7]. Il est le compagnon de la journaliste Anne Sinclair[8].
Après des études secondaires au lycée Carnot, il est au début des années 1950 élève en hypokhâgne puis en khâgne au lycée Louis-le-Grand, mais échoue au concours d'entrée à l'École normale supérieure. Il obtient par la suite une licence en philosophie et est reçu 41e à l'agrégation d'histoire en 1958.
Il est professeur au lycée Lamoricière (aujourd'hui lycée Pasteur) d'Oran (Algérie) jusqu'en 1960 ; il en rapporte un essai publié sous le titre Les Français d'Algérie (1961).
Il est pensionnaire de la Fondation Thiers de 1961 à 1963, et assistant, puis maître-assistant à l'Institut d'études politiques de Paris de 1965 à 1977. Depuis 1977, il est directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales.
Parallèlement, Pierre Nora a mené une carrière importante dans l'édition. Il entre d'abord en 1964 chez Julliard, où il crée la collection de poche Archives. En 1965, il rejoint les éditions Gallimard : la maison d'édition, déjà bien installée dans le marché de la littérature, souhaite développer son secteur des sciences sociales. C'est Nora qui accomplira cette mission en créant deux collections importantes, la Bibliothèque des sciences humaines en 1966 et la Bibliothèque des histoires en 1970, ainsi que la collection Témoins en 1967.
Chez Gallimard, Nora publie dans les collections qu'il dirige des travaux importants qui constituent généralement des références incontournables[réf. nécessaire] dans leurs champs de recherche, notamment :
Il a été président de la Librairie européenne des idées au Centre national du livre de 1991 à 1997 et membre du Conseil d'administration de la Bibliothèque nationale de France de 1997 à 2000.
Il est membre du Conseil scientifique de l'École nationale des chartes depuis 1991, du Conseil d'administration de l'Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles depuis 1995, et du Haut Comité des célébrations nationales depuis 1998.
En , il fait partie des membres fondateurs du Comité des intellectuels pour l'Europe des libertés[9].
En mai 1980, Nora fonde chez Gallimard la revue Le Débat avec le philosophe Marcel Gauchet ; elle devient vite l'une des revues intellectuelles françaises majeures, jusqu'à l'arrêt de sa publication en [10]. Il a participé à la Fondation Saint-Simon, créée en 1982 par François Furet et Pierre Rosanvallon et dissoute en 1999.
En 1990, il fait partie du petit nombre d'historiens, avec notamment Pierre Vidal-Naquet et Madeleine Rebérioux, à s'opposer à la loi Gayssot[11].
Il s'est opposé à la loi du « portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur de Français rapatriés » en cosignant une pétition dans le quotidien Libération intitulée Liberté pour l'histoire[12]. Cette loi, dont l'alinéa 2 de l'article 4 a été abrogé le , établissait que les programmes de recherche devaient accorder plus d'importance à la place de la présence française outre-mer et que les programmes scolaires devaient en reconnaître le rôle positif.
Pierre Nora est également très connu pour avoir dirigé Les Lieux de Mémoire, trois tomes se donnant pour but de faire un inventaire des lieux et des objets dans lesquels s'est incarnée la mémoire nationale des Français.
Il est signataire de l'appel de Blois, le .
Le pouvoir certain de Pierre Nora dans le monde de l'édition française l'a exposé à des critiques. Ainsi il refuse en 1997 de faire traduire l'ouvrage d'Eric Hobsbawm The Age of extremes (1994), en raison de l'« attachement à la cause révolutionnaire » de son auteur. Nora explique que l'hostilité au communisme qui règne en France n'est pas propice à ce genre de publication, et que, bon gré mal gré, tous les éditeurs « sont bien obligés de tenir compte de la conjoncture intellectuelle et idéologique dans laquelle s'inscrit leur production »[13]. Il rapporte aussi que François Furet, qui appelait à la traduction du livre dans une longue note du Passé d'une illusion (1995), lui aurait conseillé : « Traduis-le, bon sang ! Ce n'est pas le premier mauvais livre que tu publieras[14]. » L'attitude de Nora donne lieu à polémique avec Serge Halimi, qui l'accuse de « maccarthysme éditorial » dans Le Monde diplomatique[15]. Le livre est finalement publié en 1999 sous le titre L'Âge des extrêmes par les Éditions Complexe à Bruxelles, avec la collaboration du Monde diplomatique. Hobsbawm écrit à cette occasion un article dans Le Monde diplomatique intitulé « L’Âge des extrêmes échappe à ses censeurs », dans lequel il déclare notamment que « la résistance des éditeurs français, seuls parmi les éditeurs des quelque trente pays qui ont traduit L’Âge des extrêmes, ne laisse pas d’intriguer »[16].
Dans La Pensée tiède, ouvrage constitué de deux articles parus dans la presse anglophone en et publié en français l'année suivante aux Éditions du Seuil, l'historien Perry Anderson impute particulièrement à Pierre Nora et François Furet l'évolution de la vie intellectuelle en France depuis les années 1980, et notamment le tournant conservateur marqué par l'emprise de l'« anti-totalitarisme ». Nora fait paraître sa réponse à la fin du livre d'Anderson, dans une postface intitulée « La Pensée réchauffée. » Il y interprète les critiques de l'historien britannique comme relevant d'une « nostalgie » de l'ancien poids prépondérant du gaullisme et du communisme dans les milieux politiques et intellectuels français, prédominance suscitant « ce révoltisme natif qui constitue l'autre face de cet autoritarisme militaire caractéristique de la culture et de la société françaises. » Nora souligne que la persistance d'un « révolutionnarisme » devenu sans objet exprime « un fondamental et tragique conservatisme français[17]. » Ce texte donne lieu à une nouvelle polémique avec Serge Halimi[18].
Le , sur France Inter, à propos du génocide des Arméniens, Nora affirme que l'« affaire arménienne est très compliquée », parle d'immenses victimes et ajoute : « Si vous écrasez trois mouches, on peut aussi vous parler d'un génocide »[19], des propos qui, selon Séta Papazian, du Collectif VAN (Vigilance Arménienne contre le Négationnisme), « interpellent sur la légitimité de l’historien à s’exprimer sur des sujets qu’il ne maîtrise visiblement pas »[20]. Interrogé au sujet de la polémique qui s'ensuit, Nora indique qu'il est « hostile à toute qualification par la loi de l'Histoire » et que l'expression sur les mouches est une expression à « l'emporte pièce », puisqu'il emploie lui-même l'expression de génocide arménien[19]. Dans un entretien publié par Libération, il précise toutefois que le mot génocide est difficile à manier pour un historien, qui lui préfèrera d'autres expressions (comme massacre de masse, anéantissement, extermination), et que son usage est souvent plus politique et idéologique que moral, précisant qu'« il ne s’agit pas, bien sûr, de nier la réalité et l’ampleur du massacre et du désastre arméniens. Si les Arméniens veulent utiliser le mot génocide, je n’y vois pas d’inconvénient, la République l’a reconnu, ça suffit »[21].
Dans une tribune du Monde, le chercheur Bruno Chaouat soutient l'opposition de Pierre Nora aux lois mémorielles dans la perspective d'une indépendance de la recherche à l'égard du pouvoir législatif, mais lui reproche de ne pas critiquer l'attitude du gouvernement turc concernant les recherches historiques sur le génocide arménien[22]. Dans son entretien à Libération cité plus haut, Nora précise qu'il ne soutient pas la Turquie et qu'« il est indispensable que le gouvernement turc prenne l’initiative d’une commission internationale d’historiens à qui toute liberté de consultation des archives arméniennes et turques serait garantie. Ce gouvernement s’engagerait à en reconnaître les conclusions »[21].
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