Naissance | |
---|---|
Décès | |
Nom de naissance |
Philippe Jacques Marie de Dieuleveult |
Nationalité | |
Activités | |
Famille | |
Conjoint |
Diane de Torquat de La Coulerie (d) (de à ) |
Enfant |
Tugdual de Dieuleveult (d) |
A travaillé pour |
---|
Philippe de Dieuleveult, né le à Versailles et disparu le dans les chutes d'Inga au Zaïre, est un journaliste reporter d'images et animateur de télévision français.
De 1981 à 1984, il coanime sur Antenne 2 le célèbre jeu télévisé La Chasse aux trésors, dans lequel, chaque semaine, il incarne le rôle du journaliste-aventurier, prêt à tous les exploits aux quatre coins du monde. Sa disparition mystérieuse au Zaïre en 1985 reste controversée et sujette à plusieurs hypothèses.
Philippe de Dieuleveult est issu d'une ancienne famille bretonne, la famille de Dieuleveult[1]. Il est le benjamin d'une fratrie de sept frères, dont Yves (1938), Jacques (1939-1989), Guy (1941-1973), Jean (1942-2015), Hugues (1946) et Éric (1950-1991).
Il est élevé durement par sa mère : « Aux prises quotidiennes avec sept garnements, ma mère avait décidé que l'ordre et l'autorité seraient maintenus. Elle se promenait donc, du matin au soir avec une ceinture de cuir suspendue à sa taille. J'ai souvent éprouvé le contact de cette lanière de cuir qui parfois m'a fait saigner »[2].
En 1977, il se marie avec Diane de Torquat, qui est une descendante du corsaire Robert Surcouf, avec laquelle il aura trois enfants : Erwann (1978), Tugdual (1981) et une fille, Anaïd, née le , quelques jours après sa disparition.
Il accomplit son service militaire au 1er régiment de chasseurs parachutistes. Il est diplômé « Conducteur de travaux "Bâtiment" » de l'ESTP (1975)[réf. nécessaire].
Successivement cadreur, puis pigiste à Antenne 2, Philippe de Dieuleveult se destine assez vite au reportage. En , il se classe troisième à l'émission des télévisions francophones La Course autour du monde qui permet aux candidats, en échange d'un reportage par semaine diffusé sur les télévisions francophones organisatrices, de partir à la découverte du monde pendant quatre mois, caméra Super 8 au poing[réf. nécessaire].
En 1979, Philippe de Dieuleveult est engagé comme journaliste reporter d'images (JRI) par Jean-Claude Criton, journaliste, producteur et réalisateur d'une émission spéciale pour FR3 (Le Nouveau Vendredi de Jean-Marie Cavada) sur le Tchad. En 1980, juste après la révolution iranienne, il accompagne Alain Dubos (vice-président de Médecins sans frontières) en Iran dans une mission d'exploration clandestine, à des fins d'aide humanitaire[3]. Selon le site Observatoire de l'action humanitaire, il est bénévole pour MSF France[4].
À partir du , il coanime sur Antenne 2 l'émission de jeu La Chasse aux trésors, tout d'abord avec Philippe Gildas. Le jeu passionnera le public francophone pendant plus de quatre ans. Enregistrant l'émission chaque semaine dans un pays différent dans le monde entier, il marque alors les téléspectateurs par sa sympathie, son humour et ses prises de risques (chute depuis un hélicoptère, plongée sous-marine, saut en parachute en direct, etc.). L'émission, diffusée le dimanche soir, arrivera souvent en tête des audiences. Il chevauche souvent une Yamaha Ténéré pour effectuer ses explorations[5]. Il coanime l'émission avec Jean Lanzi et Marie-Thérèse Cuny en 1982, puis avec Didier Lecat et Elsa Manet. Le dernier numéro, qui se déroule à Ndjolé, au Gabon, est diffusé sur la TSR le puis sur Antenne 2 le 2 décembre suivant.
En 1980, Philippe de Dieuleveult frôle de peu la noyade en tentant d'accéder au fort Boyard en mer agitée. Il y reste coincé trois heures avant d'être secouru en hélicoptère. Cet épisode inspire par la suite Jacques Antoine (créateur de La Chasse aux trésors) dans la création de l'émission télévisuelle Fort Boyard[6].
Dans le même temps que ses activités télévisuelles, Philippe de Dieuleveult enregistre en 1984 un disque, Los Angeles 84, à l'occasion des Jeux olympiques de Los Angeles. Puis il publie son autobiographie, J'ai du ciel bleu dans mon passeport (Grasset), qui en l'espace de cinq semaines devient un best-seller avec plus de 300 000 exemplaires vendus.
Ce passionné d'aventures en Afrique envisage aussi de participer au Paris Dakar 1985/1986 en tant que journaliste chroniqueur des étapes. Finalement, ce sera Gérard Holtz qui le remplacera.
Parallèlement à ses activités dans les médias, Philippe de Dieuleveult est capitaine de réserve de la direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE), le service de renseignement français[7],[a].
Cette appartenance est révélée par son frère Jean, le :
« — Il appartenait aux services secrets français : il mʼavait confié ça il y a une vingtaine dʼannées, parce que jʼétais officier, et son frère. Mais ça cʼest tout à son honneur ! Il servait la France. Cʼest une façon de servir son pays que dʼappartenir aux services secrets.
— Dans ses missions (lui demande alors le journaliste), il servait aussi la France ?
— Dans ses missions, oui : tout officier sert la France ! et le renseignement, cʼest la base de tout ! […]
— Est-ce que lorsquʼil sʼest présenté aux barrages d'Inga, il pouvait avoir une deuxième casquette qui était celle dʼofficier des renseignements ?
— Non. Parce que jʼai rencontré à lʼépoque, il y a neuf ans, le patron du service Action, qui mʼa certifié que Philippe nʼétait pas en mission. Il mʼa donné sa parole dʼofficier[8]. »
Le fait sera formellement confirmé par son fils Tugdual dans son documentaire Philippe de Dieuleveult : enquête sur un mystère (2006), qui présente à l'écran les convocations de son père à des stages d'entraînement[9]. Dans ce même documentaire, sa femme, Diane, affirme qu'elle le savait depuis le début, « parce qu'il me l'avait dit », et laisse entendre qu'il s'agit alors dans la famille, d'un secret de polichinelle. Quant au patron de la DGSE de l'époque, il écrira aux enquêteurs (dans un document visible dans le documentaire de Tugdual de Dieuleveult) :
« Monsieur Philippe de Dieuleveult a été en contact épisodique avec le Service à partir de 1979 où il a réalisé un stage de sélection afin dʼintégrer les réservistes du Service. Il y a été admis le . Ce statut de réserviste nʼimplique en aucune manière que lʼintéressé fasse partie des effectifs de la DGSE. Sa situation était comparable à celle de tout réserviste de lʼarmée. En particulier, il nʼa jamais effectué de mission opérationnelle. »
Le secret et la protection des agents étant la base des renseignements, il convient toutefois de prendre ces informations et ces démentis avec précaution jusqu'à l'ouverture des archives ; d'autant qu'un document secret, en date du , le convoque à un stage commando ; l'année suivante, il apprendra les « techniques de la guérilla en zone rurale » et recevra les félicitations de sa hiérarchie[9].
En 1985, Philippe de Dieuleveult entreprend, avec une dizaine de compagnons, la descente en rafting du fleuve Zaïre, deuxième fleuve du monde par son débit après l'Amazone avec 50 000 m3/s. L'explorateur démarre sa descente fluviale depuis le lac Tanganyika. Il s'agit de l'expédition « Africa-Raft », comprenant deux radeaux pneumatiques. Le , ses deux radios cessent d'émettre, alors que l'équipe établit une communication quotidienne avec Paris. Philippe de Dieuleveult disparaît avec six autres membres de l'opération dans les chutes d'Inga. Un autre membre de l'équipe, Thierry Sadoun, n'est pas à bord de l'expédition et a pu rejoindre Paris[10].
François Laurenceau et Jean-Louis Amblard, devant la dangerosité des chutes d'Inga, réputées infranchissables (ce qui a justifié la construction du chemin de fer Matadi-Kinshasa entre 1890 et 1898), abandonnent le matin de la tragédie et restent sur le bivouac sur l'île aux Hippopotames. Sept heures après le départ des rafts, les deux hommes parviennent à pied au barrage d'Inga où ils se retrouvent face à des gendarmes en alerte. Ils apprennent que le télex de Kinshasa annonçant le passage de l'expédition est bien arrivé au poste de sécurité du barrage afin de ne pas prendre les membres de l'expédition pour des mercenaires voulant plastiquer les installations, « mais le responsable de la sécurité l'a gardé sous son coude et a envoyé des patrouilles sur les rives », selon Laurenceau et Amblard[11].
La disparition de l'équipe est annoncée dans les journaux télévisés d'Antenne 2 des 10[12] et [13]. Le correspondant de l'AFP qui a communiqué l'information à sa rédaction relate la disparition de Dieuleveult et de son équipe dans les rapides du fleuve Zaïre dans les colonnes du Monde le [14]. Il est entre-temps déclaré persona non grata par les autorités zaïroises et expulsé du pays[15],[16].
En 1994, France 2 présente les révélations de l'ancien officier zairois, Okito Bene-Bene qui affirme que Philippe de Dieuleveult ne serait pas mort dans un accident sur le fleuve Zaire mais aurait été exécuté par les services secrets zaïrois[17].
En 2006, Jérôme Pin et Tugdual de Dieuleveult, 25 ans, fils de Philippe, réalisent une enquête qui fait l'objet d'un documentaire diffusé par Canal+ révélant « les enjeux cachés de sa disparition, dans le jeu complexe des relations franco-africaines[18] »[19].
En 2020, l'Institut national de l'audiovisuel présente une rétrospective des reportages consacrés à la disparition et à ses différentes analyses[20].
La même année, Alexis de Dieuleveult, neveu de Philippe, prenant la suite des recherches de son père Jean décédé, publie aux éditions Balland, Noyade d'État[21], un ouvrage exposant des « détails mettant à mal la thèse de l'accident par noyade que défendent les gouvernements français et zaïrois »[22]. Le paraît chez le même éditeur une réédition de l'ouvrage sous titrée « Je ne veux pas me taire », augmentée d'une centaine de pages présentant de nouveaux éléments[23] que l'auteur détaille le sur RTL[24]. En février 2023, Alexis de Dieuleveult demande la réouverture de l'enquête et porte à nouveau plainte contre X pour assassinat[25]
Enfin, selon le journal belge Le Soir en date du , c'est la thèse de l'accident qui est la plus vraisemblable[26][source insuffisante].
En 2006, une enquête réalisée par Tugdual de Dieuleveult et Jérôme Pin pour Lundi Investigation, diffusée le sur Canal+[27], présente en effet un autre point de vue.
Selon ce reportage, la version la plus crédible est celle soutenue par Jean-Louis Amblard, à savoir une bavure[b] de l'armée zaïroise sur trois des participants (Philippe de Dieuleveult, Angelo Angelini et Lucien Blockmans) à bord du raft nommé « Françoise » et d'une noyade pour les quatre autres (André Hérault, Richard Janelle, Guy Colette et Nelson Bastos) sur le « Godelieve » dont l'épave est retrouvée disloquée alors que le « Françoise » est récupéré intact, accosté le long d'une petite crique[28]. Cette version est aussi soutenue par l'amiral Pierre Lacoste, chef de la Direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE) à l'époque, et Gérard d'Aboville dans le reportage de Tugdual, mais l'absence d'indices sur la bavure laisse planer le doute.
Certains supposent[Qui ?] que les autorités zaïroises et françaises auraient accrédité l'accident en soutenant la thèse de la noyade sans avoir cherché à comprendre ce qui avait pu se passer. Les raisons de cette réaction de l'État français auraient été diplomatiques et peut-être liées à l'appartenance supposée de Philippe de Dieuleveult à la DGSE[29].
Au même moment dans la région, la présence de Laurent Désiré Kabila, principal opposant politique de Mobutu Sese Seko, président du Zaïre, est alors attestée dans un camp installé le long du fleuve où étaient présents des conseillers militaires cubains et soviétiques, avec de nombreux rebelles angolais et zaïrois.[réf. nécessaire]
L'hypothèse de son assassinat a été évoquée en 1994 par Okito Bene-Bene, un ex-officier des services secrets zaïrois qui affirme, dans un livre intitulé J’ai vu mourir Philippe de Dieuleveult chez Michel Lafon, que Dieuleveult a été éliminé avec d'autres membres de l'expédition. Il affirme que les autorités zaïroises pensaient que l'expédition Africa Raft était un commando qui venait attaquer le barrage d'Inga.
Dans ce livre, Okito Bene-Bene, réfugié en Belgique en 1990 et aujourd'hui décédé, dit avoir assisté à l'exécution de Philippe de Dieuleveult. Il décrit en détail ses dernières heures. Après avoir été mis au cachot et avoir subi des heures d'interrogatoire dans un camp militaire, il aurait été exécuté avec quatre de ses compagnons dans la nuit du [30]. À la suite de ces révélations, Jean de Dieuleveult, le frère de Philippe de Dieuleveult, porte plainte contre X pour assassinat. La brigade criminelle de la PJ parisienne lance une enquête et conclut que la thèse de l'assassinat ne tient pas car le seul corps retrouvé de l'équipe, Guy Colette, a été exhumé et n'affichait aucun impact de balle. À cette époque (1999), les services français retiennent la thèse de l'accident comme la plus plausible à 99 %[31].
Cette hypothèse qui ne s'appuie que sur la parole d'un homme, est cependant confortée dans une enquête publiée par le journal XXI en et intitulée « Les crocodiles du Zaïre »[32]. La journaliste Anna Miquel[33], à la suite de plusieurs séjours en République démocratique du Congo (ex Zaïre) rapporte des témoignages d'anciens des services de sécurité de Mobutu ainsi que des documents qui racontent que Philippe de Dieuleveult a été arrêté puis éliminé avec d'autres de ses compagnons d'aventure[34] Parmi les documents de l'enquête d'Anna Miquel dans l'ex Zaïre, il y a un procès-verbal d'audition qui dit que le (deux jours après la disparition officielle des sept membres de l'expédition « Africa Raft » dans les chutes d'Inga), Philippe de Dieuleveult a été interrogé à Kinshasa par un officier de la « Division spéciale présidentielle » (DSP), la garde personnelle de l'ex-président Mobutu Sese Seko. Les divers témoignages publiés dans l'article vont dans le même sens.
Le procès-verbal de cet interrogatoire, que la journaliste affirme avoir retrouvé, débute selon elle par « L'an mille neuf cent quatre-vingt-cinq, le huitième jour du mois d'août, a été entendu le prévenu Philippe Dieuleveult ». Ce document porte selon la journaliste l'en-tête de la DSP et la mention « pro-Justicia ». Toujours selon elle, il est estampillé « République du Zaïre » et porte deux signatures : celle du « major K. », « chef d'opérations » et celle du « comparant » Philippe de Dieuleveult, authentifiée par son frère Jean de Dieuleveult[35]. Ce dernier saisit le procureur de la République[36] en 2009 pour ouvrir à nouveau le dossier et porter plainte pour assassinat contre X précisant que d'après lui, il y a eu une manipulation de l'État français, dont Roland Dumas est alors le ministre des Affaires étrangères[37],[38]
Cependant, les enquêteurs de la brigade criminelle française déterminent que les documents utilisés par Anna Miquel sont des faux, dont le prétendu procès-verbal d'audition de Philippe de Dieuleveult sur lequel sa signature a été « scannée, et rehaussée à l'encre »[39].
Un droit de suite est donnée début janvier 2010 par la revue XXI[40].
Un documentaire produit par Gaumont TV et France Télévisions intitulé Dieuleveult, les disparus du fleuve et diffusé le sur France 2 reprend cette thèse controversée[41]. Écrit par Anna Miquel et Yannick Saillet, il est jugé complotiste par l'émission Arrêt sur images, qui rappelle que Anna Miquel est « la même journaliste qui signait en 2008 l'enquête de XXI qui se basait sur un document qui a depuis été déclaré faux par la brigade criminelle française »[42]. Ce documentaire est également dénoncé par les enfants de Philippe de Dieuleveult qui fustigent « un film qui est un tissu d'approximations et de suppositions » et « Ce qui nous pose problème, c'est que l'on diffuse de tels documentaires, faits par des gens qui travaillent n'importe comment. »[39].
Le contenu présenté de l'article Wikipédia a été extrait en 2023-05-23 sur la base de https://fr.wikipedia.org/?curid=1785503