Le mur du son est un phénomène physique aérodynamique caractérisé par l'atteinte d'une vitesse au moins égale à celle de la vitesse du son dans l'air, soit 340 mètres par seconde, soit 1 224 km/h (dans l'air à 15 °C) ou Mach 1, et provoquant une onde de choc sous forme de déflagration supersonique.
Quand un mobile atteint la vitesse du son dans un fluide (comme un avion dans l'air ou l'entrée atmosphérique d'un bolide[1]), il se produit un phénomène de concentration de l'onde de surpression qui provoque une onde de choc (qui peut être entendue dans l'air). Ainsi, quand, à proximité, un avion s'est déplacé à une vitesse supérieure (ou égale) à celle du son dans l'air, on entend une sorte d'explosion ou bang supersonique, parfois un double bang. Ce phénomène accompagne l'objet tant que sa vitesse reste supérieure (ou égale) à celle du son ; c'est pourquoi le bang que l'on peut entendre ne correspond pas au franchissement du mur du son.
Le mur du son est un phénomène lié au domaine transsonique. Un écoulement autour d'une aile (autour d'une balle de fusil, c'est qualitativement la même chose), subsonique loin de celle-ci, est accéléré dans son voisinage jusqu'à atteindre Mach 1. Le retour au subsonique se fait à travers une compression brutale, l'onde de choc. Ceci entraîne une augmentation de la traînée et un décollement à l'aval de l'onde de choc qui se traduit par une instabilité analogue au décrochage.
Si la vitesse augmente à partir de là, l'onde de choc recule jusqu'à atteindre le bord de fuite et il se forme une autre onde de choc devant le bord d'attaque. Le mur du son est alors franchi ; l'écoulement a retrouvé la stabilité avec le régime supersonique qui se caractérise par les deux ondes de choc à l'origine du double bang (cette idée est controversée, l'avion ne crée globalement qu'une seule onde de choc, les effets des différentes parties de l'avion se confondant très vite loin de l'avion ; cet effet ne permettrait jamais à un auditeur au sol d'entendre distinctement deux bangs, phénomène qui ne peut correspondre qu'à une modification de vitesse ou de trajectoire de l'aéronef).
Quand l'atmosphère est très humide, par un phénomène proche de celui qui produit la traînée blanche courante derrière un avion à réaction, le phénomène peut s'accompagner d'une condensation locale qui permet de visualiser l'onde de choc sous la forme d'une sorte de « bouclier » plus ou moins vaste qui suit légèrement l'avion.
On entendait sur les premiers avions supersoniques un double bang, mais souvent très proches et pas toujours faciles à distinguer. D'après une théorie très commune, le premier correspondrait à l'onde de choc issue du nez de l'avion et surtout du bord d'attaque des ailes, le second serait formé sur l'empennage. L'oreille humaine ne pourrait pas distinguer deux ondes aussi rapprochées, qui se regroupent en une onde unique à grande distance de l'avion[2]. Le « vrai » double bang était produit par des évolutions brutales (accélérations, virages) entraînant la formation de plusieurs ondes de chocs arrivant successivement, avec des écarts temporels suffisants, aux oreilles des observateurs. Par erreur, certains parlent de double bang du fait que l'onde de choc est formée d'une période de compression et d'une période de dépression, mais l'oreille humaine ne perçoit qu'un seul phénomène sonore (ainsi que ses possibles échos sonores suivant le relief local).
Le terme de mur du son a une signification d'abord historique. En effet, lorsque les aviateurs de la Seconde Guerre mondiale ont commencé à s'approcher de cette limite, ils ont remarqué des phénomènes d'instabilité et un « durcissement » des commandes de l'avion. Cette combinaison a rendu l'approche de cette limite particulièrement difficile, au point que les aviateurs avaient fini par l'appeler le « mur du son ». À la fin de la guerre, en , le pilote allemand Hans Guido Mutke aurait été le premier à passer le mur du son lors d'un piqué à 12 000 mètres avec son Messerschmitt Me 262 au cours duquel son cadran serait resté bloqué à 1 100 km/h après de violentes secousses[3].
Un avion expérimental britannique, inspiré du Messerschmitt 163 Komet, le De Havilland DH 108 Swallow, construit dans les années quarante pour tester le domaine des vitesses transsoniques se désintégra aux approches de la vitesse du son coûtant la vie à son pilote d'essai le 27 sept 1946, Geoffrey de Havilland Jr. (en), le propre fils du constructeur Geoffrey de Havilland. Cet accident frappa l'imagination du public et accrédita l'idée qu'il s'agissait d'une limite infranchissable.
Lorsque Chuck Yeager a franchi formellement cet obstacle à bord du Bell X-1 le , le terme est quand même resté pour donner une description imagée d'une augmentation brutale de la résistance.
« Mur du son » est une expression que l'on doit à un ingénieur britannique des années 1940, W. F. Hilton, qui se demandait si un avion pourrait jamais dépasser la vitesse du son. L'aérodynamisme et la voilure des avions, en forme de flèche, contribuent à pallier les inconvénients des ondes de choc. Cependant, aucun moyen n'a été réellement expérimenté pour éviter le bang supersonique, car la pointe du cône de Mach part de l'avion et sa base se dirige vers la terre.
Depuis l'arrêt de l'avion de ligne Concorde en 2003, seuls des avions militaires atteignent des vitesses supersoniques.
Le , le Thrust SSC bat le record de vitesse au sol dans le désert de Black Rock au nord du Nevada et dépasse le mur du son en atteignant les 1 227,99 km/h.
Le , Felix Baumgartner est le premier homme à passer le mur du son en chute libre. Il saute d'un ballon gonflé à l'hélium d'une altitude de 36 529 mètres au-dessus du désert du Nouveau-Mexique. Comme annoncé par l'équipe Red Bull Stratos et de très nombreux titres de presse, en atteignant 1 357,6 km/h[4],[5],[6], il dépasse le mur du son durant sa chute. Il aurait plus précisément atteint 1,25 fois la vitesse du son d'après les résultats officiels[5].
Fin , le projet X-59 d'avion supersonique de la NASA est en bonne voie. Celui-ci devrait réduire très fortement, voire résoudre le problème du 'bang' supersonique. Dans un communiqué du , l’agence spatiale indique que son avion supersonique X-59 est prêt pour l’assemblage final. Tous les systèmes de l’appareil (fuselage, aile, empennage), faisant l’objet de chantiers différents, seront assemblés en un seul chantier en 2020, finalisant ainsi l’appareil X-59.
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