Les Désaxés (film)

Les Désaxés
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Titre original The Misfits
Réalisation John Huston
Scénario Arthur Miller
Acteurs principaux
Sociétés de production Seven Arts Productions
Pays d’origine Drapeau des États-Unis États-Unis
Genre Drame
Durée 124 minutes
Sortie 1961


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Les Désaxés (The Misfits) est un film américain de John Huston sorti en 1961, d'après la nouvelle Les Misfits (The Misfits) d'Arthur Miller.

Synopsis

Reno dans le Nevada, la ville des mariages expéditifs et aussi celle des divorces rapides.

C'est la raison de la présence de Roslyn accompagnée d'Isabelle, à la fois son amie et sa logeuse. Sur place, elle rencontre Guido, garagiste, qui, à la suite de la panne de sa voiture, la conduit au tribunal pour son divorce. Après l'officialisation du divorce, les deux femmes vont prendre un verre dans un bar à cocktail, le Harrah's Reno (en), où elles rencontrent Gay, un ami de Guido, cow-boy et aventurier dilettante qui a pour projet de capturer un troupeau de chevaux sauvages pour gagner de l'argent. Tous ont envie d'« autre chose » et décident de se rendre à la maison de campagne inachevée de Guido, que l'ancien aviateur a construite pour sa défunte épouse, décédée quelques années plus tôt des suites d'un accouchement. Gay et Guido tombent sous le charme de Roslyn et lui demandent de rester quelques jours de plus à Reno avant de retourner chez elle. Une idylle naît bientôt entre la jeune femme et Gay, également divorcé. Ils passent ensemble quelques jours heureux, même si Gay doit accepter l'amour qu'elle porte aux animaux. Il aimerait aussi savoir pourquoi elle est toujours aussi triste.

Quelques jours plus tard, les deux hommes partent chasser les mustangs. Roslyn les suit à contre-cœur. Ayant besoin d'un troisième homme, ils le trouvent en la personne de Perce qui participe à un rodéo, au cours duquel il se blesse. Ils finissent dans un bar où ils s'enivrent. Perce, éleveur dépossédé de son domaine et fragilisé par des blessures personnelles, tombe lui aussi amoureux de Roslyn.

Le lendemain, ils partent chasser les quelques chevaux repérés. Tandis que Guido les rabat avec son avion, les deux autres les attrapent au lasso mais finalement les relâchent sur l'insistance de Roslyn lorsqu'elle apprend que les bêtes sont destinées aux abattoirs et aux conserves pour chien. Aussi perdue que les trois hommes mais ayant gardé le sens intact du caractère sacré de la vie, elle annonce qu'elle part le lendemain[1].

Fiche technique

Distribution

Cascades

Jack N. Young (Doublure de Clark Gable)

Analyse

John Huston choisit de réaliser un drame intimiste en noir et blanc, de filmer au plus près des visages, et d'ignorer les déserts hypnotiques du Nevada[3]Arthur Miller, au printemps 1956, a écrit dans un cabanon loué à Reno, capitale des divorces, une nouvelle (qui deviendra le scénario du film) alors qu'il attend que soit prononcé le divorce qui lui permettra de se marier avec sa maîtresse, l'actrice Marilyn Monroe. Alors que l'écrivain new-yorkais se saoule dans des bars miteux avant de se jeter dans l'arène du rodéo, il découvre à cette occasion que ce désert est « un refuge des déracinés, des vagabonds, des paumés, des criminels en cavale[4] ».

Le film est un poème désenchanté sur la fin des mythes américains : mythe de l'Ouest américain, mythe de l'innocence, mythe de La Frontière, mythe des cow-boys libres dans la nature. « En cela, le scénario de l'écrivain Arthur Miller dresse un constat grinçant et particulièrement sombre de l’Amérique d'Eisenhower de la fin des années 1950, une nation qui a du mal à communiquer et dont le rêve des "Pères fondateurs" a échoué[1] ».

Production

Le , Marilyn Monroe, enceinte de son mari Arthur Miller, doit être emmenée aux urgences. Les médecins diagnostiquent une grossesse extra-utérine, qu'il faut interrompre pour protéger la vie de l'actrice. Elle apprend qu'elle ne pourra jamais avoir d'enfant. C'est à l'hôpital que son mari décide de lui offrir un cadeau d'amour en adaptant sa nouvelle The Misfits pour le cinéma, et d'écrire un rôle sur mesure pour sa femme déçue que la 20th Century Fox la cantonne à des personnages d'idiote ravissante et ingénue ou de vamp stéréotypée dans des comédies légères. Miller passe une année à en écrire le scénario qu'il propose à John Huston, un des rares réalisateurs en qui Marilyn Monroe a confiance[5].

Le tournage à Reno a lieu du 18 juillet au 24 octobre 1960, puis s'achève le 24 novembre dans les studios d'Hollywood où quelques scènes nécessitant des trucages sont filmées[6].

Musique

La bande originale du film a été composée par Alex North en 1961.

  • Main theme
  • Rendez vous
  • New life
  • Roslyn (Misfits theme)
  • Love's reverie
  • Love idyll
  • Paddleball
  • Reno bar dance
  • Compassion compassion for Guido
  • Help
  • The round-up suite: disagreement, round-up, chase, tension
  • Trying for freedom
  • resolved part I
  • Resolved - end title[7]

Accueil

Alors que le film a coûté plus de 4 millions de dollars, les recettes recueillies sur le territoire américain s'élèvent à seulement 4,1 millions de dollars. Les Désaxés est d'abord un échec public et critique[1].

Sorti en France le 1961, le film enregistre 896 256 entrées[8].

Dès le début de la production, les attentes de la United Artists autour de The Misfits sont très grandes. Réunissant la crème d'Hollywood, le film suscite logiquement l'espoir d'un succès public et critique considérable mais ces attentes laissent très vite place à la désillusion, et les recettes sont désastreuses. Il faudra attendre quelques années, le temps que la mythologie autour de l'œuvre se construise, puis sa sortie en vidéo, pour qu'elle acquière le statut de film majeur[9].

Autour du film

Lee Jones Schoenburg, responsable des projets spéciaux de Magnum Photos, obtient pour la première fois dans l'histoire du cinéma, l'exclusivité de son agence de presse pour la couverture photographique du film. De nombreux photographes de premier plan (Eve Arnold, Cornell Capa, Henri Cartier-Bresson, Bruce Davidson, Elliott Erwitt, Ernst Haas, Inge Morath, etc.) se relaient par équipe de deux tous les quinze jours pour prendre des clichés lors du tournage[10],[11].

Le film, qui n'eut guère de succès à sa sortie, est aujourd'hui connu pour des raisons qui tiennent moins à son contenu qu'à la vie de ses interprètes. Clark Gable mourut d'un infarctus quelques semaines après la fin du tournage, et Marilyn Monroe ne termina jamais son film suivant, Something's Got to Give (George Cukor, 1962). Montgomery Clift tourna encore trois films et mourut à quarante-cinq ans. Il n'en fallait pas davantage pour établir l'image « crépusculaire » des Misfits – fin du mythe de l'Ouest, fin de l'âge d'or d'Hollywood[1].

En 2018, une scène coupée du film a même été retrouvée, une scène dans laquelle on pouvait apercevoir Marilyn Monroe nue[12],[13].

En 2016, le dessinateur Luz entame sous forme de feuilleton mensuel dans les Cahiers du Cinéma la publication d'une bande-dessinée consacrée au tournage, Misfits[14].

Dernière apparition au cinéma pour Rex Bell, star du western des années 30, dans un petit rôle de cow-boy. Au moment du tournage, il était lieutenant-gouverneur du Nevada.

Ralph Roberts, le masseur et confident de Marilyn Monroe, interprète le rôle de l'ambulancier dans la scène du rodéo.

Clark Gable

Les Désaxés est le dernier film de Clark Gable, né le , décédé le , soit quelques jours après la fin du tournage (4 novembre). Il avait 59 ans. Les relations avec Marilyn Monroe furent tendues sur le plateau, au point que certains témoignages rapportent une réflexion de Gable au sujet de sa partenaire : « She damn near gave me a heart attack » (« elle a failli me donner une crise cardiaque »)[15].

Marilyn Monroe

Dans son 29e et dernier film (achevé) où elle se trouve seconde au générique, derrière Clark Gable et devant Montgomery Clift, Marilyn Monroe interprète un rôle spécialement écrit pour elle par son mari Arthur Miller, celui d'une femme qui vient de divorcer, qui est perdue, qui ne sait pas où aller ni que faire, et qui est très déçue des hommes. Le personnage de Roslyn conçu par Miller s'inspire à beaucoup d'égards de Marilyn qui hésite longtemps avant d'accepter le rôle[16]. Monroe est morte quelques mois après la fin du tournage, à 36 ans.

En proie à une grave dépression nerveuse, Marilyn Monroe, fragile et vulnérable, boit et consomme beaucoup de médicaments, ce qui rend le tournage difficile (retards incessants de quatre à cinq heures, prises des scènes multipliées à l'envi car elle n'arrive pas à mémoriser ses dialogues, tournage arrêté en car elle est hospitalisée à Los Angeles pendant 12 jours etc.) qui dure plus de trois mois au lieu de 50 jours[17].

La dernière femme de Gable, Kay (enceinte à cette époque) considère que Marilyn Monroe a été responsable de la rapide chute de santé de son mari, puis de sa subite mort quelques jours plus tard, en raison de son mode de travail, ce qui l'a jetée dans une nouvelle phase de dépression[18]. Elle n'est pas allée assister à la cérémonie funéraire de la star défunte. Kay l'invite cependant au baptême du fils que Clark Gable n'a jamais connu. Certains commentateurs ont par la suite mentionné le fait que Gable a tenu à jouer toutes ses scènes dans le film, y compris les cascades, qui l'ont beaucoup sollicité et fatigué.

Eli Wallach

Eli Wallach, le dernier des quatre acteurs principaux, est contrairement aux trois autres, décédé plus de 50 ans après avoir tourné le film (, à 98 ans). Il acquiert une notoriété internationale trois ans après la sortie des Désaxés en interprétant le rôle de Tuco (« Le Truand ») dans le western spaghetti Le Bon, la Brute et le Truand (1966) de Sergio Leone[Information douteuse].

Montgomery Clift

En 1956, Montgomery Clift est victime d'un grave accident de voiture qui le défigure. Il subit de nombreuses opérations de chirurgie esthétique, laissant apparaître cependant quelques cicatrices, le minant, mais qui donnent plus de réalisme à son rôle de cow-boy de rodéo blessé par ses chutes de cheval[19].

Après le tournage du film, Marilyn Monroe déclare à propos de l'acteur : « Il est le seul être qui soit encore plus perdu que moi »[20].

Notes et références

Notes

  1. Dans la « note de l'auteur » en préambule de cette nouvelle[2], Arthur Miller précise que Les Misfits n'est « ni [un] roman, ni [une] pièce de théâtre, ni [un] découpage cinématographique. » Ce serait « une fiction qui allierait les qualités directes de l'image aux possibilités de transmission de l'écriture. »

Références

  1. a b c d et e Ludovic Béot, « Pourquoi "Les Désaxés" de John Huston est-il l'un des films les plus morbides de l'histoire du cinéma ? », sur lesinrocks.com, .
  2. Arthur Miller (trad. René Masson), Les Misfits, Robert Laffont, coll. « Le Livre de Poche » (no 3372), , 187 p., p. 11-12.
  3. Christophe Leclerc, Le cinéma de John Huston : entre l'épique et l'intime, Editions Publibook, , p. 94.
  4. Christiane Desafy-Grignard, Arthur Miller: une vie à l'œuvre, Sémaphore, , p. 101.
  5. (en) J. Randy Taraborrelli, The Secret Life of Marilyn Monroe, Hachette UK, , p. 248.
  6. (en) William R. Meyer, The Making of the Great Westerns, Arlington House, , p. 309.
  7. Alex North et John Huston, The Misfits = Les Désaxés : [bande originale du film de] John Huston / Alex North, compos., dir., Metro-Goldwin-Mayer, (lire en ligne).
  8. « John Huston (Réalisateur américain) », sur jpbox-office.com (consulté le ).
  9. « Pourquoi "Les Désaxés" de John Huston est-il l'un des films les plus morbides de l'histoire du cinéma ? », sur Les Inrocks (consulté le ).
  10. (en) James Goode, The Story of The Misfits, Bobbs-Merrill, , p. 24.
  11. Serge Toubiana, Arthur Miller, The Misfits : chronique d'un tournage par les photographes de Magnum, Cahiers du Cinéma, , 189 p..
  12. https://www.parismatch.com/Culture/Cinema/Une-scene-de-Marilyn-Monroe-nue-a-ete-retrouvee-1568660 / consulté le 18 novembre 2020.
  13. « Une scène de Marilyn Monroe nue dans "Les Désaxés", coupée au montage, vient d'être découverte », sur Franceinfo, (consulté le ).
  14. Cahiers du Cinéma, « Édito no 725, septembre 2016 La rentrée cinéma », sur www.cahiersducinema.com (consulté le ).
  15. (en) Ann Lloyd, Marilyn: a Hollywood life, Mallard Press, , p. 94.
  16. (en) Serge Toubiana, The misfits: story of a shoot, Phaidons, , p. 56.
  17. (en) Jeffrey Meyers, The Genius and the Goddess: Arthur Miller and Marilyn Monroe, University of Illinois Press, , p. 218-219.
  18. (en) Kenneth T. Jackson, The Scribner Encyclopedia of American Lives: 1986-1990, Charles Scribner's Sons, , p. 447.
  19. (en) Jeffrey Meyers, The Genius and the Goddess: Arthur Miller and Marilyn Monroe, University of Illinois Press, , p. 217.
  20. Olivier Rajchman, « Montgomery Clift - Une place en enfer », Studio Ciné Live no 76,‎ , p. 130.

Voir aussi

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Bibliographie

  • Pierre Acot Mirande, « Les Misfits », Téléciné, no 102, Paris, Fédération des Loisirs et Culture Cinématographique (FLECC), février-, fiche no 401, (ISSN 0049-3287)
  • (en) James Goode, The Story of The Misfits, Bobbs-Merrill, 1963
  • Serge Toubiana, The Misfits : chronique d'un tournage par les photographes de Magnum, Cahiers du cinéma, 1999

Article connexe

Liens externes

Information

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