Le Train (film, 1964)

Le Train
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De gauche à droite : Burt Lancaster, Michel Simon (au second plan) et Paul Scofield.
Titre original The Train
Réalisation John Frankenheimer
Bernard Farrel
Scénario Franklin Coen
Frank Davis
Acteurs principaux
Sociétés de production Les Productions Artistes Associés
Les Films Ariane
Dear Film Produzione
Pays de production Drapeau des États-Unis États-Unis
Drapeau de la France France
Genre Drame
Guerre
Action
Durée 127 minutes
Sortie 1964

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Le Train (The Train) est un film franco-américain de John Frankenheimer et Bernard Farrel, sorti en 1964.

Le scénario du film s'inspire d'un épisode réel de la Seconde Guerre mondiale, le déraillement en France du train dit « d'Aulnay » en , dont le chargement contient des œuvres d'art de grande valeur et dont l'acheminement vers l'Allemagne est stoppé grâce à l'action de cheminots de la Résistance et aux signalements de Rose Valland, alors attachée de conservation au musée du Jeu de paume.

Synopsis

En , le colonel Franz von Waldheim, grand amateur d'art, fait évacuer des tableaux de maîtres de la galerie nationale du Jeu de paume et des œuvres dites « dégénérées » issues de spoliations en France par les Allemands[1] pour les envoyer en Allemagne. Des caisses contenant les œuvres, tableaux et objets, sont transportées jusqu'à une gare pour être mises dans un train de marchandises en partance pour l'Allemagne.

Paul Labiche, un cheminot résistant, est choisi pour conduire la locomotive à vapeur du train. Mais avant, il doit se reposer. Il est emmené par un officier allemand, le commandant Herren, dans un petit hôtel près de la gare pour la nuit. Il doit être prêt le lendemain très tôt. Le matin du départ il est surveillé dans le poste de conduite de la machine par un soldat allemand en compagnie de son chauffeur chargé d'alimenter la chaudière en charbon. Le train démarre lentement… Avec l'aide de nombreux compagnons résistants, il fait en sorte que le convoi n'arrive jamais à destination. Avec l'aide des cheminots et de la Résistance de terrain, le train est dérouté par un aiguilleur en cabine, afin de ne jamais parvenir en Allemagne, grâce notamment au maquillage des plaques de gare.

L'opération commence par le nom de la gare de Rémilly, affiché sur un château d'eau situé au bord de la voie. Immédiatement après le passage du train, la banderole est détachée par des résistants et dévoile le nom de Pont-à-Mousson. La gare de Commercy devient Saint-Avold grâce à un changement des plaques, deux faux soldats allemands sont présents sur le quai et communiquent un renseignement à Labiche. On peut lire « Commercy » sur la plaque arrière de la lanterne que le chef de gare porte à sa main droite.

Le train est ensuite censé passer la frontière franco-allemande et se retrouver en gare de Deux-Ponts (affichée sous son nom allemand, Zweibrücken) ; en réalité on constate, après enlèvement du panneau par des résistants cheminots, qu'il s'agit en fait de la gare de Vitry-le-François. Dans une voiture incorporée au convoi, deux Allemands notent au fur et à mesure sur un plan le nom des gares traversées. Puis le train se retrouve à « Rive-Reine ». Dans un plan détaillé du film en gros plan, on voit qu'une veste posée sur un petit panneau indicateur masque le nom de la gare.

Michel Simon dans le rôle de Papa Boule

Un grave déraillement est provoqué par quelques cheminots en inversant une aiguille de voie. Les auteurs sont rapidement arrêtés et exécutés, mais le train est immobilisé pendant plusieurs heures. Quelques soldats de la petite escorte de Waldheim trouvent la mort au cours des différents incidents émaillant le voyage. Toutefois, ce dernier intervient en personne et le train peut repartir.

De sabotage en sabotage, le train réussit à progresser lentement : les Allemands prennent des otages choisis au hasard et les installent à l'avant et sur les cotés de la locomotive, Waldheim est accompagné par le commandant Herren et une cinquantaine d'hommes armés.

Sur une voie unique en pleine campagne, Labiche boitant arrivé sur place, enlève des tirefonds qui maintiennent les rails sur les traverses, provoquant le déraillement de la locomotive et l'arrêt du convoi. Au même moment, un convoi militaire allemand chargé de soldats blessés passe sur la route parallèle à la voie. Waldheim le stoppe et tente de réquisitionner les camions pour charger les caisses contenant les tableaux, mais l'officier commandant le convoi refuse. Waldheim donne l'ordre de le fusiller, en vain : le commandant Herren le persuade que les Alliés sont aux portes de Paris, la partie est perdue. Herren et ses hommes exécutent alors tous les otages retenus sur la locomotive, puis montent à bord des camions en abandonnant les caisses de tableaux sur le bord de la voie. Waldheim refuse de les accompagner et reste seul sur place.

C'est le moment de l'ultime confrontation entre le colonel Waldheim et Labiche. Le colonel accuse Labiche de n'être qu'une brute qui ne comprendra jamais rien à l'art et lui demande pourquoi il fait tout ça. Labiche se retourne sans dire un mot, apercevant alors les cadavres des otages gisant sur le talus. Il abat le colonel d'une rafale de mitraillette. Le film se termine sur un plan de Labiche qui s'éloigne sur la route.

Fiche technique

Distribution

Référence[3] :

Acteurs non crédités :

Production

Tournage

Le tournage commence en . C'est Arthur Penn qui doit à l'origine réaliser le film, mais en cours de tournage, Burt Lancaster obtient son renvoi au bout de trois jours[4] car l'acteur ne partagerait pas ses vues sur le film[1]. Celui-ci souhaite que les machines et l'action l'emportent, principalement pour regagner un public après l'échec commercial du Guépard, de Visconti. Walter Bernstein retravaille le scénario en ce sens.

La plupart des figurants sont des habitants d'Acquigny.[réf. souhaitée]

Dans la version française, le personnage de l'officier allemand, le colonel Franz von Waldheim (interprété par Paul Scofield) est doublé en allemand quand il s'adresse à ses soldats et aux officiers subalternes et sous-titré en même temps en français, alors que dans la version originale ses dialogues sont en anglais[5].

Burt Lancaster profite d'une journée de repos en cours de tournage pour aller jouer au golf et s'y blesse à la jambe. Afin qu'il puisse tourner les scènes restantes en claudiquant, il est décidé de rajouter une scène où Lancaster reçoit une balle dans la jambe.

Lieux de tournage

  • Les principales scènes ferroviaires sont tournées à Argenteuil (Val-d'Oise)-triage, Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) - Les docks, la Glacière-Gentilly (Paris), Vaires-Torcy (Seine-et-Marne), Gargenville (Yvelines) et Acquigny (Eure).
  • La première gare supposée être en Allemagne (Deux-Ponts), est l'ancienne gare de Provins (Seine-et-Marne), qui, à l'époque, est en bois.
  • La scène des viaducs et du tunnel lors de l'attaque aérienne du train est tournée à Moulineaux en Seine-Maritime, sur la ligne qui traverse la forêt de La Londe.
  • D'autres scènes sont tournées dans l'Eure, à Pacy-sur-Eure, dans les parages d'Acquigny (la gare de « Rive-Reine » dans le film) et d'Heudreville-sur-Eure dans la vallée d'Eure, notamment celle où Burt Lancaster (en fait, un cascadeur de l'équipe de Claude Carliez, du nom de Jean Chardonneaux) escalade les flancs abrupts d'une colline dominant la voie. La scène finale du déraillement se situe non loin de la gare d'Heudreville.
  • L'impressionnante scène de télescopage entre deux trains est tournée en gare d'Acquigny à l'aide de sept caméras, dont trois sont détruites accidentellement à cette occasion.
  • La scène de bombardement pendant lequel Papa Boule réussit à sortir son train du triage est tournée à Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne). Pour cette occasion, un poste d'aiguillage est reconstruit spécialement sous forme d'un décor et cela permet de le voir pulvérisé par une bombe.
  • Pour la suite du bombardement de la gare de Vaires, les scènes de destruction les plus importantes sont tournées dans l'ancien triage de Gargenville (Yvelines). Sous les directives de Lee Zavitz, plus de cinquante personnes, dont le Français Bernard Château, préparent pendant six semaines les explosifs qui, lors du tournage, sautent tous en moins d'une minute.
Toutefois, la scène montre des explosions de faible importance, très rapprochées géographiquement et ne laissant aucun cratère, alors que les bombardements stratégiques alliés sont réalisés avec des bombes puissantes ; celles-ci fournissent un effet de souffle destructeur et creusent des cratères importants, mais tombent dans des périmètres souvent nettement plus larges que la cible, en raison de l'imprécision inhérente aux techniques d'armement.


Le passage à niveau d'Acquigny en 1986, le lieu de tournage des scènes de déraillements du film. Le passage à niveau d'Acquigny en 1986, le lieu de tournage des scènes de déraillements du film. Le passage à niveau d'Acquigny en 1986, le lieu de tournage des scènes de déraillements du film.
Le passage à niveau d'Acquigny en 1986, le lieu de tournage des scènes de déraillements du film.


Légende et réalité

Le scénario évoque les tableaux volés par le Commissariat général aux questions juives dans le cadre des lois d'« aryanisation » qui organisent durant le régime de Vichy la spoliation des personnes déclarées « juives » mais aucune mention n'est faite de cet arrière-plan[6], qui reste un tabou jusqu'à la fin du XXe siècle. Seuls la cruauté de l'occupant et l’héroïsme de la Résistance sont mis en avant.

Le « train d'Aulnay » est un fait réel, mais il s'avère qu'il transporte principalement des meubles[7]. Seules cent quarante-huit œuvres, jugées de moindre importance par l'« équipe opérationnelle du directeur d'État Rosenberg » (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg ou ERR), y sont chargées[8]. Le , sur ordre de Hermann Göring, elles sont transportées jusqu'à la gare par camion depuis le musée du Jeu de paume, dans la cour duquel sont auparavant brûlés un grand nombre de chefs-d’œuvre de l'« art dégénéré », des Picasso, des Braque… Les trente et un wagons du train no 40044 ne partent jamais vraiment de la gare d'Aubervilliers. Il y restent plus d'un mois principalement parce que le personnel allemand manque pour faire le chargement et que les hommes affectés à cette tâche ne sont pas qualifiés pour l'accomplir, mais aussi parce que les cheminots français savent inventer toutes sortes de prétextes.

Quand le , soit deux jours après la reddition du général von Choltitz, commandant allemand de la place de Paris, est ordonné le départ vers Nikolsburg[9] via le château de Neuschwanstein en Bavière, où l'Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg (ERR, ou Équipe d'intervention du Reichsleiter Rosenberg) tient encore un dépôt, un détachement de six volontaires de la deuxième division blindée (2e DB) est envoyé aussitôt sous la conduite du lieutenant Alexandre Rosenberg[10].

À la manière des « Monuments Men » américains, la patrouille intercepte le train à un peu plus de huit kilomètres, dans la gare suivante, qui est celle d'Aulnay-sous-bois[11]. Les soldats allemands qui sont à bord ne se défendent absolument pas. Les caisses contenant des tableaux, dont beaucoup de Marie Laurencin, sont déchargées. L'une d'elles porte l'indication « Rosenberg 152 Portrait de femme 0.90 0.83 ». Le lieutenant, bien différent du Labiche du film, ignore qu'il y a là un tableau, Femme assise en gris de Roger Bissière[12] qui appartient à son père[9], le marchand d'art Paul Rosenberg réfugié à New York. Il est restitué quelques mois plus tard avec d'autres œuvres par la Commission de récupération artistique (CRA), où siège à partir de septembre Jacques Jaujard. C'est le premier acte officiel de restitution d'une œuvre d'art.

Analyse

Erreurs et incohérences

Anachronismes

  • Le film commet une erreur du point de vue historique en mettant en scène les gares lorraines de Moselle sous leurs noms français (Metz, Saint-Avold, etc.) et comme partie du territoire administré par la France (alors que la Moselle est annexée par l'Allemagne) et place la frontière entre la Moselle et la Sarre, alors qu'elle se trouve à cette époque entre Pagny-sur-Moselle (en Meurthe-et-Moselle) et Novéant (en Moselle).
  • De même, le train continue de rouler à gauche (entrée en fausse gare de Saint-Avold), alors qu'en Alsace-Moselle (ex-Alsace-Lorraine) la circulation est restée à l'allemande (à droite) depuis l'annexion de 1871.
  • Beaucoup de scènes d'extérieur montrent une végétation dénudée, hivernale, sans aucun rapport avec la saison supposée de l'action, la fin août (dans la scène de la rencontre avec le chef des résistants après le principal sabotage, celui-ci annonce la libération de Paris par la deuxième division blindée, commencée le ). Le noir et blanc permet pour partie de ne pas trop souligner cet anachronisme.
  • Peu avant le bombardement des installations de la gare de triage de Vaires-sur-Marne, une vue d'ensemble du site laisse entrevoir, pendant quelques secondes, plusieurs véhicules stationnés sur un parking, qui sont postérieurs à 1944. Il y a, semble-t-il, notamment une Simca Aronde P60 de couleur claire, automobile des années 1960, date du tournage du film.
  • Dans certains plans, apparaissent en ligne d'horizon des immeubles de logements sociaux, récents à l'époque du tournage mais certainement pas construits avant (encore moins pendant) l'Occupation.

Autour du film

  • Une des scènes les plus spectaculaires de ce film évoque le bombardement des installations de la gare de triage de Vaires-sur-Marne.
  • La gare de « Rive-Reine » est fictive, aucune gare française ne portant ce nom. C'est l'ancienne gare désaffectée d'Acquigny qui est utilisée pour le tournage sur la ligne de Rouen à Orléans, le tronçon concerné étant fermé depuis 1950.
  • On ne voit pratiquement qu'un seul type de locomotive à vapeur dans ce film : le type 230 B, notamment la 1-230 B 739 et son tender 22 A 739, la 1-230 B 616 et la 1-230 B 855 avec son tender 22 A 886. Dans la scène de télescopage, on peut apercevoir une antique 030 C de type Bourbonnais (la no 757) qui est durement éperonnée par la 230 B.
  • Le train est armé d'un canon automoteur de 12,2 cm FK(r) auf GW Lorraine Schlepper(f). On ignore ce qu'il en advient après le tournage.
  • On peut découvrir d'étonnantes images en couleurs dans le DVD Passion des trains no 33 diffusé par les Éditions Atlas. Il s'agit de scènes du tournage (making-of en anglais) réalisées par le service cinéma de la SNCF. Il comprend également une interview de Michel Simon.

Notes et références

  1. a et b « Le Train », sur Arte.tv (consulté le ).
  2. Bernard Farrel est crédité comme coréalisateur sur les copies (et les affiches) françaises. Exigé par la législation fiscale française, il n'était pas autorisé à mettre les pieds sur le plateau et son nom est totalement absent des copies américaines. [1]
  3. « Le Train (1964) - Full Cast & Crew - IMDb », sur imdb.com (consulté le ).
  4. Peter Biskind (trad. de l'anglais), Le Nouvel Hollywod, Paris, Le Cherche Midi (réédité en Points), , 692 p. (ISBN 978-2-7578-0427-8), p. 32.
  5. Le Train, DVD Blu-ray, 2010.
  6. Charles Delheim, « Nazi Art Loot », in B. Kirshenblatt Gimblett (en) & J. Karp (en), The Art of Being Jewish in Modern Times. Jewish Culture and Contexts., p. 329, Presses universitaires de Pennsylvanie, Philadelphie, 2013 (ISBN 9780812208863).
  7. C. Bouchoux, « ”Si les tableaux pouvaient parler”… Le traitement politique et médiatique des retours d’œuvres d’art pillées et spoliées par les nazis (France 1945-2008). », thèse de doctorat, Faculté d'histoire de l'université d’Angers, Angers, 2011.
  8. Rose Valland, Le Front de l'art. Défense des collections françaises, 1939-1945., p. 217, Plon, Paris, 1961.
  9. a et b « Database of Art Objects at the Jeu de Paume », cote B323/288, in Cultural Plunder by the Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg, Archives fédérales, Coblence, 2010.
  10. Le lieutenant Alexandre Rosenberg est le futur oncle maternel de la présentatrice Anne Sinclair
  11. Thomas Poupeau, « En 1944, à Aulnay, les résistants avaient attaqué le train nazi de tableaux volés », sur leparisien.fr, (consulté le )
  12. [PDF] Didier Schulmann, Œuvres récupérées après la Seconde Guerre mondiale, confiées à la garde du Musée national d'art moderne, p. 5-6, CNAC, Paris, 9- 21 avril 1997.

Voir aussi

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Articles connexes

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