Réalisation | Jean-Pierre Melville |
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Scénario |
Jean-Pierre Melville Georges Pellegrin |
Acteurs principaux | |
Sociétés de production | CICC, Fida Cinematografica |
Pays d’origine |
France Italie |
Genre | film noir |
Durée | 105 minutes |
Sortie | 1967 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Le Samouraï est un film noir franco-italien réalisé par Jean-Pierre Melville, sorti en 1967.
C’est une histoire simple dont les protagonistes ont une démarche ambigüe, propre à de multiples interprétations.
Le début montre un homme en train de voler une DS, puis passer dans un garage clandestin faire changer les plaques d’immatriculation et se faire remettre une fausse carte grise et un revolver. Il s’agit de Jef Costello, tueur à gages solitaire et taciturne qui a été chargé de tuer Martey, le patron d'une boîte de jazz.
Il va ensuite chez Jane Lagrange, sa maîtresse, avec laquelle il met au point l’alibi dont il va avoir besoin la nuit même : celle-ci devra dire qu’il était avec elle de 19 h 15 à 1 h 45, un riche « client », qui par ailleurs l’entretient, devant la rejoindre à son appartement à 2 h. Puis, Jef passe dans un tripot clandestin et prévient les joueurs qu’il reviendra vers 2 h du matin.
Enfin, il se rend dans la boite de nuit, enfile des gants blancs, comme pour un cérémonial, traverse la salle aux yeux de tous, voûté et le chapeau vissé sur la tête, gagne les coursives, entre dans le bureau du patron et l’abat. En sortant du bureau de sa victime, il croise Valérie, la pianiste du club, avec laquelle il a un simple échange de regards. Enfin, après s’être débarrassé de ses gants et du revolver, il entre à nouveau dans l’immeuble de Jane, guette l’arrivée de son « client » et s’arrange pour le croiser comme s’il en sortait. Puis il abandonne la DS.
Il bénéficie ainsi d’un solide alibi : Jane jurera qu’il était avec elle à l’heure du crime. L’homme, par ailleurs au-dessus de tout soupçon, qui entretient Jane pourra au besoin conforter ses dires en témoignant en toute bonne foi qu’il lui semble avoir croisé quelqu’un sortant de l’immeuble peu avant 2 h du matin. Ensuite, chacun des joueurs du cercle pourra témoigner que Jef était là dès 2 h. Il n’y aura ainsi aucun « blanc » dans son emploi du temps, celui-ci étant conforté par trois témoignages différents.
La police ne tarde pas à débouler dans le cercle de jeu et embarque Jef, car il n’y est arrivé qu’à 2 h, ce qui fait de lui un coupable possible.
Bien qu’il n’ait pas d’arme et n’ait pas de casier judiciaire, Jef devient rapidement le suspect numéro un du commissaire chargé de l'enquête, car il correspond au portrait-robot du tueur. Il est donc confronté aux employés et aux clients du club. Les témoignages, contradictoires, sont inexploitables. Le témoin-clé, Valérie, la pianiste (la seule qui l'a vu bien en face), nie catégoriquement le reconnaître et même ment sur la couleur du chapeau du tueur, comme si elle voulait le protéger. Jane certifie qu’il était avec elle et cet alibi est, comme prévu, conforté par le fait que le « client » de Jane, qui se révèle être un observateur hors pair, reconstitue comme étant celle de Jef la silhouette de l’homme qu’il a croisé en entrant dans l’immeuble de Jane, alors même que l’imperméable et le chapeau de Jef ont été dispatchés sur deux autres hommes. Mais l’opinion du commissaire chargé de l’enquête est faite : pour lui, c’est bien Jef le tueur. Il devient rapidement hostile et se met à le tutoyer :" Je vais te faire changer de ton, moi !". Pour des raisons qui restent indéterminées (conscience professionnelle exacerbée ? Besoin de revanche à prendre sur un échec antérieur ? Antipathie spontanée ?), il va s’acharner à le confondre. Cependant, au petit matin, après une nuit d’interrogatoires et de confrontations, faute de preuve et de témoignage probant, il ne peut, à contre-cœur, que le relâcher. Il le fait cependant suivre, mais Jef parvient à s’éclipser.
Le commanditaire de Jef, ayant appris que celui-ci a été cuisiné par la police, décide de le liquider pour qu’on ne puisse remonter jusqu’à lui.
Jef se rend sur un pont au-dessus de voies ferrées, lieu de rendez-vous convenu avec un envoyé du commanditaire pour récupérer le solde de l’argent du contrat. Là, l’intermédiaire tente de le tuer mais ne réussit qu’à lui faire une estafilade à un bras. Jef rentre chez lui et panse sa plaie sous l’œil intéressé de son bouvreuil qui pépie dans sa cage. Il veut maintenant, tout en échappant à la surveillance policière, trouver ceux qui ont cherché à l’éliminer.
Le lendemain, Jef retourne au club. Là, il a un échange de regards appuyé avec Valérie, la pianiste. Quand elle sort, Jef l’aborde pour savoir pourquoi elle a cherché à le couvrir : coup de foudre ? Simple lubie ? Ou avait-elle pour mission de le disculper ? Elle reste évasive et lui demande de lui téléphoner dans deux heures.
Pendant ce temps, deux policiers installent un micro dans la planque de Jef, intrusion inhabituelle qui n’est pas sans affoler son oiseau.
Puis, le commissaire et deux de ses hommes débarquent chez Jane et mettent tout sens dessus dessous. Après cette mise en condition qui a pour but de l’impressionner, le commissaire joue l’apaisement et utilise tous les arguments possibles - chantage, menaces, offre de « protection » - et tente même, pour la faire revenir sur sa déposition, de susciter sa jalousie en lui révélant que son amant a rencontré la pianiste, mais en vain.
Jef rentre chez lui et retrouve son bouvreuil qui saute et se cogne aux barreaux de sa cage, encore tout affolé. Comprenant alors qu’il a eu une visite, il fouille partout et découvre le micro. Puis, il descend dans un bistrot et rappelle Valérie, qui ne répond pas.
De retour chez lui, Jef est accueilli, pistolet au poing, par l'homme qui l'avait déjà blessé. Celui-ci n'a pourtant pas d'intention meurtrière : il lui règle le solde dû pour l'assassinat de Martey et le paie, cette fois en totalité, pour une nouvelle mission. Jef parvient à endormir sa méfiance, puis lui saute dessus, le maîtrise et le fait parler. Chevaleresque, il part en lui laissant la vie sauve.
En sortant, Jef est longuement suivi dans le métro de Paris par un dispositif comportant plusieurs dizaines de policiers en civil ; mais au terme de ce jeu du chat et de la souris, il parvient une fois encore à les semer. Il passe une dernière fois chez Jane pour la rassurer. Puis, il va chez son commanditaire, un certain Olivier Rey, qui vit dans le même hôtel particulier que Valérie sans que leurs liens ne soient explicités, et le tue.
Jef retourne ensuite dans la boîte de nuit. Il enfile à nouveau des gants blancs et se dirige vers Valérie, qui lui murmure dans un souffle : "Ne reste pas là". Il sort alors son revolver, car c’est elle sa nouvelle victime. Elle lui demande : "Pourquoi Jef ?", ce à quoi il lui répond seulement : "On m’a payé pour ça". Mais la police, qui l'attendait, l'abat. Le commissaire dit à Valérie : "Vous l’avez échappé belle : sans nous, c’est vous qui seriez morte". Puis, on découvre que le barillet du revolver de Jef était vide. A-t-il voulu épargner Valérie par amour ? S’agit-il d’un suicide ? Son comportement aura été ambigu jusqu’au bout et il emporte avec lui son secret dans la mort.
Le film commence avec une citation, rédigée par Melville lui-même[1] prétendument tirée du livre du Bushido : Il n'y a pas de plus profonde solitude que celle du samouraï si ce n'est celle du tigre dans la jungle, peut-être... Le film est fortement inspiré de : Tueur à gage avec Alan Ladd[réf. nécessaire].
Nathalie Delon est à l'époque l'épouse d'Alain Delon[2].
Jacques Deschamps, qui joue ici le rôle du policier au micro dans la scène des confrontations, est spécialisé dans le doublage. Au cours des mêmes années, il double les voix de Robert Stack dans la série Les Incorruptibles et de Clint Eastwood dans la Trilogie du dollar, réalisée par Sergio Leone.
Le film est tourné du au .
Arrivant sur les lieux du tournage (le studio de la rue Jenner) et découvrant la chambre ascétique de Jef Costello, Alain Delon félicite le décorateur François de Lamothe : « C’est formidable ce que tu as fait, ma poule ! »[3].
C'est pendant le tournage du Samouraï que les studios Jenner, si chers à Jean-Pierre Melville, sont incendiés le . Le décorateur François de Lamothe relate qu'en arrivant au studio le matin, il aperçoit une colonne de fumée et des voitures de pompiers. « Je découvre le studio ravagé par le feu, détruit de fond en comble. Melville, encore en pyjama, totalement trempé par les lances à incendie, déambule hagard au milieu des débris fumants ». Finalement, Lamothe reconstruit un nouveau décor en un temps record : deux semaines[3].
Le tournage a lieu principalement à Paris.
Jef Costello jette dans la Seine, depuis le Pont Alexandre-III, l'arme à feu avec laquelle il a abattu Martey, en exécution d'un meurtre commandité.
Pour percevoir l'argent du contrat, il prend le métro et descend à la station Porte d'Ivry. Il emprunte ensuite l'escalier intérieur de la gare du boulevard Masséna, située sur la ligne de Petite Ceinture. Puis il accède au lieu de rendez-vous, sur la passerelle métallique, détruite en 2004, qui franchit le faisceau de voies ferrées reliant Paris-Austerlitz à Juvisy et à Bordeaux.
La filature dans le métro est filmée sur les lignes 11 et 7 (actuelle 7 bis), aux stations Télégraphe, Place des Fêtes et Châtelet, ainsi que dans des rames MP 55 aujourd'hui réformées.
La pianiste de la boîte de jazz habite l'hôtel particulier situé 22 avenue de Messine (8e arrondissement), qui possède un salon à escalier double. Demeure d'Alain Delon dans les années 1960, il abrite actuellement le Centre culturel de l'ambassade d'Ukraine.
À deux reprises, Jef Costello se rend chez un receleur taciturne pour faire changer sa plaque d'immatriculation, obtenir une fausse carte grise et un revolver. Le garage se trouve dans un endroit isolé et indéfini de la banlieue parisienne.
Fernando Di Leo a mentionné la grande influence qu'a eu Le Samouraï sur sa trilogie du Milieu et notamment sur Milan calibre 9 (Milano calibro 9), un poliziottesco sorti en 1972[4].
John Woo a régulièrement cité ce film comme source d'inspiration pour ses œuvres Le Syndicat du crime (英雄本色, Ying huang boon sik) et The Killer (喋血双雄, Die xue shuang xiong).
Chow Yun-fat a produit et joué un rôle très similaire dans Un tueur pour cible (The Remplacement Killers).
La saga de jeux vidéo Hitman rend également hommage au film de Jean-Pierre Melville. En effet, l'agent 47, le tueur à gages du jeu, a non seulement une personnalité très semblable à celle de Jef Costello, mais son seul compagnon est aussi un oiseau enfermé dans une cage.
Le cinéaste danois Nicolas Winding Refn cite Le Samouraï comme une de ses influences directes pour son film Drive. Les personnages principaux des deux œuvres ont effectivement de nombreux points communs : ils sont mutiques, froids, et solitaires.
Le film Ghost Dog : La Voie du samouraï (Ghost Dog: The Way of the Samurai) de Jim Jarmusch sorti en 1999 emprunte des références à de très nombreux films de genre (western, film noir, comédie, etc.), mais l'hommage le plus important est celui rendu par Jim Jarmusch à Jean-Pierre Melville pour son film Le Samouraï. On peut ainsi retrouver comme inspiration :
En 2012, l'album MDNA de Madonna contient une chanson, Beautiful Killer, qui rend hommage à Alain Delon dans Le Samouraï. À cette occasion, la popstar déclare son admiration pour l'acteur, dont elle affirme avoir vu tous les films[5].
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