Alexandre Grothendieck

Alexandre Grothendieck
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Alexandre Grothendieck en 1970.
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Alexandre (ou Alexander[1]) Grothendieck (prononcé en allemand : [ˈɡroːtn̩diːk]) est un mathématicien français, né le à Berlin et mort le à Saint-Lizier[2], près de Saint-Girons (Ariège). Il est resté longtemps apatride tout en vivant principalement en France ; il obtient la nationalité française en 1971[3].

Il est considéré comme le refondateur de la géométrie algébrique et, à ce titre, comme l'un des plus grands mathématiciens du XXe siècle[4],[5]. Il était connu pour son intuition extraordinaire et sa capacité de travail exceptionnelle. La médaille Fields lui a été décernée en 1966.

Biographie

Ascendance et enfance

Sacha Schapiro, son père.

Sacha Schapiro, son père[6], également connu sous le nom de Tanaroff, est un anarchiste militant ukrainien né à Novozybkov, ville située aujourd’hui en Russie, dans l'oblast de Briansk. Il est issu d’une famille juive de hassidim. Après avoir passé dix ans en prison pour sa participation à plusieurs soulèvements anti-tsaristes, Sacha Schapiro rejoint Berlin en 1922 ; il y rencontre sa future compagne, journaliste, également anarchiste, Johanna « Hanka » Grothendieck[7], originaire d’une famille protestante hambourgeoise aisée[8] qui aurait émigré des Pays-Bas au XVIIIe siècle[a]. Johanna est alors mariée à Johannes « Alf » Raddatz[9],[10], également journaliste : Alexander naît de la liaison de sa mère avec Sacha Schapiro mais porte d’abord le nom de son père légitime[11], « Raddatz » dont Hanka divorce en 1929 sans épouser pour autant Sacha[12], père biologique d’Alexander, qui reconnaît l'enfant. Ensuite, Alexander porte le nom de sa mère, qui a repris son nom de jeune fille, « Grothendieck »[13].

Hanka Grothendieck, sa mère.

Hanka et Sacha fréquentent le mouvement libertaire. En 1933, la montée du nazisme le contraint à quitter l'Allemagne pour la France où elle le rejoint en 1934, puis ils partent pour l'Espagne soutenir[14], lors de la révolution sociale espagnole de 1936, le mouvement anarcho-syndicaliste. Dès mai 1934, Alexander est placé par sa mère dans la famille de Wilhelm Heydorn[15], un pasteur protestant luthérien antinazi, et maître d'école[16],[17], alors installé près de Hambourg. En 1939 les Heydorn, vivant dans la crainte de la répression nazie, considèrent qu’il est dangereux pour un enfant ayant une « apparence juive[17] » de rester auprès d’eux et demandent, par l'intermédiaire du consulat français de Hambourg, à ses parents de le reprendre avec eux : Alexander est mis dans un train pour Paris où il rejoint ses parents en mai 1939. Les retrouvailles sont de courte durée : son père Sacha se retrouve interné au camp du Vernet en Ariège ; Alexander ne le reverra plus[17]. En 1940, Hanka et son fils sont emmenés au camp de Rieucros, à côté de Mende, en Lozère ; le jeune Alexander est autorisé à quitter le camp pour aller étudier au lycée Chaptal à Mende. C'est pendant cette période qu'il francise son prénom en « Alexandre »[11]. En 1942, son père Sacha est transféré du Vernet, à Noé dans la Haute-Garonne, puis à Drancy, d’où il est déporté le [18] à Auschwitz[3]. Il y meurt, selon toute vraisemblance, peu de temps après son arrivée[b]. De 1942 à 1944, après le franchissement de la ligne de démarcation par les troupes allemandes, Alexandre est séparé de sa mère[19] et caché au Chambon-sur-Lignon[20], à la Guespy, une maison d'enfants du Secours suisse aux enfants[21], dirigée par Juliette Usach, et où sont également cachées de nombreuses autres jeunes victimes des lois raciales. Il est alors élève du collège Cévenol, de la même ville, où il passe son baccalauréat à la fin de la guerre.

Étudiant

À la fin de la guerre, Alexandre retrouve sa mère pour s'installer avec elle à Meyrargues (Vendargues) près de Montpellier[22], où ils vivent modestement avec la bourse d'études d'Alexandre ou bien avec des travaux saisonniers comme les vendanges ou encore avec les ménages que fait sa mère[19]. Inscrit en mathématiques à l'université de Montpellier, il fréquente très peu les amphithéâtres, préférant travailler seul à la définition du concept de volume[23], premières recherches qui, en même temps qu'elles l'initient à la solitude du chercheur, le mènent à redéfinir l'intégrale de Lebesgue.

En 1948, il se rend à Paris avec une lettre de recommandation signée par son professeur d'analyse, Jacques Soula[24],[25] et adressée à Élie Cartan. Il frappe à la porte d'André Magnier, inspecteur général de mathématiques et membre de l'Entraide universitaire de France, qui lui accorde une bourse[26]. Le professeur Henri Cartan, le fils d'Élie, l'admet dans ses séminaires à l'École normale supérieure (ENS) et le dirige vers Jean Dieudonné et Laurent Schwartz qui se trouvent à Nancy — l’un des « bastions » mathématiques à cette époque dans le domaine de l'analyse fonctionnelle — afin de préparer sa thèse. Laurent Schwartz, pour tester les capacités de Grothendieck, lui confie un article qu'il venait de publier avec Dieudonné et qui contient une liste de quatorze problèmes irrésolus, en lui suggérant d'en regarder un ou deux pour se familiariser avec le domaine ; Grothendieck les résoudra tous en quelques mois[27],[28],[29]. C'est le début de sa carrière mathématique.

Mathématicien

Il est attaché de recherche du CNRS de 1950 à 1953. Des six articles qu'il rédige pendant cette période, il en choisit un, « Produits tensoriels topologiques et espaces nucléaires », pour soutenir sa thèse. À la suite de la présentation à Paris, par Laurent Schwartz, des travaux de Grothendieck, celui-ci intègre le groupe de Nicolas Bourbaki où il restera plusieurs années[c]. En , il devient père de son premier enfant qu'il eut d'une liaison avec Marcelle (Aline) Driquert, sa logeuse nancéienne[31], il peine alors à trouver un travail. Par ailleurs, sa situation d'apatride l'empêche d'accéder aux emplois de la fonction publique et la naturalisation ne peut être obtenue qu'après avoir accompli le service militaire : il refuse (par antimilitarisme) et doit donc trouver un moyen de gagner sa vie. Il quitte la France pour travailler, en tant que professeur invité, au Brésil de 1953 à 1954 — il est alors chargé de recherche du CNRS — puis à l’Université du Kansas en 1955 et à l’Université de Chicago. C'est au cours de cette période qu'il change de sujet d'étude.

Après des travaux remarquables en analyse fonctionnelle, il se tourne vers la géométrie algébrique. Il révolutionne ce domaine en établissant de nouvelles fondations et introduit la notion de schéma, en collaboration avec Jean-Pierre Serre. Les deux chercheurs correspondent énormément et leurs styles, bien que très différents[réf. souhaitée], se complètent et portent leurs fruits.

Il revient à Paris en 1956 en tant que maître de recherche du CNRS, et se penche sur la topologie et la géométrie algébrique. Il produit alors une nouvelle version du théorème de Riemann-Roch et met en évidence le lien caché entre les propriétés analytiques et topologiques d'une variété.

En 1957, le décès de sa mère, victime de la tuberculose qu'elle avait contractée pendant la guerre lors de son séjour dans le camp de Rieucros[32], le plonge plusieurs mois dans un état dépressif. L'année suivante, il décide de terminer ses travaux inachevés et réalise quelques percées spectaculaires. Il rencontre également sa future femme, Mireille, avec qui il aura trois enfants.

Le bâtiment principal de l'IHES.

Il est accueilli dans le tout nouvel Institut des hautes études scientifiques (IHÉS), consacré à la recherche en physique théorique et en mathématiques. Il y est rejoint par Jean Dieudonné, René Thom, Louis Michel et David Ruelle, et entreprend de construire une théorie de la géométrie algébrique[d].

Entre 1960 et 1967, il rédige les quatre premiers chapitres (divisés en huit volumes) des Éléments de géométrie algébrique, en collaboration avec Jean Dieudonné.

Lauréat de la médaille Fields en 1966[33], il refuse de se rendre en URSS pour la recevoir.

Rupture avec les institutions

Un voyage au Viêt Nam en 1967, le printemps de Prague et Mai 68 le poussent vers les milieux contestataires jusqu'à ce qu'il démissionne de l'IHÉS en 1970, en signe de protestation contre le financement partiel de l'institut par le ministère de la Défense.

À la suite de sa démission, il fonde avec Pierre Samuel et Claude Chevalley le groupe écologiste et politique Survivre et vivre dans le but de propager ses idées antimilitaristes et écologistes. Sa maison est alors grande ouverte aux groupes hippies dont il est le « gourou » local[34].

Grothendieck obtient un poste de professeur associé au Collège de France où, le il introduit son cours de mathématiques par une séance intitulée « Science et technologie dans la crise évolutionniste actuelle : allons-nous continuer la recherche scientifique[35] ? » Il aborde ainsi les questions non techniques de la survie « sous sa propre responsabilité, sans sanction officielle, et sans que le fait soit signalé sur les affiches du Collège de France »[36] car « une majorité de professeurs du Collège de France a voté contre, une première dans l’histoire de la vénérable institution[37] ». Son contrat ne sera pas renouvelé.

En 1972, aux États-Unis, Grothendieck rencontre Justine Bumby, une étudiante en mathématiques ; il divorce alors et fonde avec elle une communauté près de Paris. En 1973, il obtient un poste de professeur à l’université de Montpellier, qu'il occupe jusqu'à sa retraite en 1988. Le couple déménage dans un village de l'Hérault et expérimente la contre-culture. Justine Bumby donne naissance à un enfant, John, qui est ensuite lui-même devenu mathématicien[38] ; elle quitte son compagnon peu de temps après la naissance de leur enfant.

Grothendieck écrit quatre livres de 1980 à 1995 : La Longue Marche à travers la théorie de Galois, Esquisse d'un programme[39], À la poursuite des champs (en) et Les Dérivateurs[40],[41]. Par ailleurs, le plus célèbre de ses ouvrages est Récoltes et Semailles[23], une autobiographie de près d’un millier de pages, écrite vers 1985, qui ne trouve pas d'éditeur. Il y montre comment sa vie a été successivement traversée par trois passions : les mathématiques, la quête de la femme et la méditation[42].

En 1988, il refuse le prix Crafoord, qu’il partage avec Pierre Deligne[43], invoquant que[3],[44] :

  • [son] salaire de professeur […], est beaucoup plus que suffisant pour [ses] besoins matériels ;
  • les chercheurs de haut niveau auxquels s'adresse un prix prestigieux comme le prix Crafoord sont tous d'un statut social tel qu'ils ont déjà en abondance et le bien-être matériel et le prestige scientifique, ainsi que tous les pouvoirs et prérogatives qui vont avec ;
  • il s’est éloigné du milieu scientifique depuis 1970 et la récompense porte sur des travaux vieux de vingt-cinq ans.

Il rejette également un Festschrift, un livre « hommage » rédigé à l'occasion de son 60e anniversaire[45], persuadé que son œuvre a été mal comprise.

En 1990, alors âgé de 62 ans, il se retire dans le petit village de Lasserre[e], proche de la chaîne des Pyrénées, en Ariège, où il mène une vie de quasi-ermite, refusant pratiquement tout contact avec ses anciennes relations, ce jusqu'à sa mort à l'hôpital de Saint-Girons[f] en 2014[2].

Manuscrits écrits pendant les années 1980

Tout en ne publiant pas de recherche mathématique de manière conventionnelle au cours des années 1980, il a produit plusieurs manuscrits influents avec une distribution limitée, à la fois mathématique et biographique. Produite entre 1980 et 1981, La Longue Marche à travers la théorie de Galois est un manuscrit de 1 600 pages contenant plusieurs des idées qui ont mené à Esquisse d'un programme. Il comprend également une étude de la théorie de Teichmüller.

En 1983, stimulé par la correspondance avec Ronald Brown et Tim Porter à l'université de Bangor, Grothendieck a écrit un manuscrit en anglais de 600 pages intitulé Pursuing Stacks (À la Poursuite des champs (en)), en commençant par une lettre adressée à Daniel Quillen. Cette lettre et les parties successives ont été distribuées à partir de Bangor (voir les liens externes ci-dessous). Au sein de ces derniers, d'une manière informelle et journalière, Grothendieck a expliqué et développé ses idées sur la relation entre la théorie de l'homotopie algébrique et la géométrie algébrique et les perspectives d'une théorie non commutative des champs. Le manuscrit, édité pour publication par G. Maltsiniotis, a ensuite conduit à une autre œuvre monumentale, Les Dérivateurs. Écrit en 1991, ce dernier ouvrage d'environ 2 000 pages, a développé les idées homotopiques commencées dans Pursuing Stacks. Une grande partie de ce travail anticipait le développement ultérieur de la théorie de l'homotopie de Fabien Morel et V. Voevodsky au milieu des années 1990.

En 1984, Grothendieck a écrit la proposition « Esquisse d'un programme » pour obtenir un poste au Centre National de Recherche Scientifique (CNRS). Il décrit de nouvelles idées pour étudier l'espace de modules de courbes complexes. Bien que Grothendieck lui-même n'ait jamais publié son travail dans ce domaine, la proposition a inspiré le travail d'autres mathématiciens en devenant la source de la théorie du dessin d'enfant et de la géométrie anabélienne. Il a ensuite été publié dans les actions géométriques de Galois en deux volumes (Cambridge University Press, 1997).

Au cours de cette période, Grothendieck a également donné son consentement à la publication certains de ses projets pour EGA sur les théorèmes de type Bertini (EGA V, publié dans Ulam Quarterly en 1992-1993 et publié plus tard sur le site Web du Grothendieck Circle en 2004).

Dans le manuscrit autobiographique de 1 000 pages Récoltes et semailles (1986), Grothendieck décrit son approche des mathématiques et ses expériences dans la communauté mathématique, une communauté qui l'a d'abord accepté de manière ouverte et accueillante mais qu'il a progressivement perçue comme étant gouvernée par la concurrence et le statut. Il se plaint de ce qu'il a vu comme « enterrement » de son travail et de sa trahison par ses anciens étudiants et collègues après avoir quitté la communauté. Les travaux de Récoltes et semailles sont maintenant disponibles sur Internet. Des parties de Récoltes et semailles ont été traduites en espagnol, en russe et publiées à Moscou ; une traduction anglaise serait en cours[Quand ?]. Une édition francaise a été publiée en janvier 2022 dans la collection Tel de la maison Gallimard.

En 1988, Grothendieck refuse le prix Crafoord et s'en explique dans une lettre ouverte aux médias. Il y écrit que les mathématiciens établis comme lui n'ont pas besoin de soutien financier supplémentaire. Il y critique ce qu'il considère comme une baisse du niveau éthique de la communauté scientifique, où le vol scientifique serait, selon lui, devenu monnaie courante et même toléré. La lettre exprime également sa conviction que des événements imprévus avant la fin du siècle entraîneront un effondrement sans précédent de la civilisation. Grothendieck ajoute que son point de vue ne « constitue en aucune façon une critique des objectifs de l'Académie royale dans l'administration de ses fonds ». Il ajoute : « Je regrette le dérangement que mon refus du prix Crafoord peut causer à l'Académie royale. » Il s'excuse pour ce dérangement.

La Clef des Songes, un manuscrit de 315 pages écrit en 1987, est le récit de Grothendieck sur la façon dont la considération de la source des rêves l'a conduit à conclure que Dieu existe. Dans le cadre des notes de ce manuscrit, Grothendieck a décrit la vie et la parole de 18 « mutants »[46], les personnes qu'il admirait comme visionnaires bien avant leur temps et qui annonçaient un nouvel âge. Le seul mathématicien de sa liste était Bernhard Riemann. Influencé par la mystique catholique Marthe Robin, qui prétendait survivre sur la seule Eucharistie, Grothendieck a failli mourir de faim en 1988. Sa préoccupation croissante à l'égard des questions spirituelles était également évidente dans une lettre intitulée Lettre de la Bonne Nouvelle envoyée à 250 amis en . Il y décrit ses rencontres avec une divinité et annonce qu'un « New Age » commencerait le , avant de se rétracter dans une nouvelle lettre envoyée deux mois après la première. Au début de 1990, il jeûne pendant 45 jours ; cet épisode est presque mortel pour lui, son fils Alexandre rappelle qu'il ressemblait à un prisonnier d'Auschwitz[47].

Travaux et influence

Le gros de l’œuvre de Grothendieck est publié dans les monumentaux, quoique inachevés, Éléments de géométrie algébrique (EGA) et dans le Séminaire de géométrie algébrique du Bois Marie (SGA). La collection Fondements de la géométrie algébrique (FGA) réunit pour sa part sa série d'exposés au séminaire Bourbaki.

Une avancée fondamentale que l’on doit à Grothendieck est l’invention de la théorie de la cohomologie étale et de la cohomologie l-adique, qui en est issue et servit de fondement pour faire passer les conjectures de Weil au stade de théorème, en particulier grâce au travail de Pierre Deligne, l'un des élèves de Grothendieck.

Par ailleurs, son travail a servi de base à Gerd Faltings pour démontrer la conjecture de Mordell, connue depuis comme le théorème de Faltings.

Dans son autobiographie, il classe ainsi ses contributions majeures (par ordre chronologique d'apparition) :

  1. Produits tensoriels topologiques (en) et espaces nucléaires
  2. Dualité (en) « continue » et « discrète » (catégories dérivées, « six opérations »)
  3. Techniques Riemann-Roch-Grothendieck (K-théorie, relation à la théorie des intersections (en))
  4. Schémas
  5. Topos
  6. Cohomologie étale et l-adique
  7. Motifs et groupe de Galois motivique (⊗-catégories de Grothendieck)
  8. Cristaux et cohomologie cristalline, yoga « coefficients de De Rham », « coefficient de Hodge »
  9. « Algèbre topologique » ∞-champs, dérivateurs ; formalisme topologique des topos, comme inspiration pour une nouvelle algèbre homotopique (en)
  10. Topologie modérée
  11. Yoga de géométrie algébrique anabélienne (en), théorie de Galois-Teichmüller
  12. Point de vue « schématique » ou « arithmétique » pour les polyèdres réguliers et les configurations régulières en tous genres.

Pendant des années, il accumule des « cartons pleins avec mes gribouillis, que je dois être le seul à pouvoir déchiffrer[48] ». En 1991, il confie à un de ses anciens étudiants, Jean Malgoire, cinq de ces cartons, contenant quelque 20 000 pages de notes rédigées depuis 1970. En 2010, il écrit à Malgoire pour lui interdire toute publication de ces notes, entreposées à la faculté de Montpellier[49].

De même, en janvier 2010, il déclare, dans une lettre adressée au mathématicien Luc Illusie, qu'il refuse toute diffusion de ses œuvres que ce soit par édition numérique ou publication/republication papier[50].

Luc Gomel, conservateur national, responsable du patrimoine de l’université de Montpellier, qui veille sur les « cartons » aujourd’hui, souhaite les faire classer « trésor national » afin qu'ils échappent au droit commun et donc au refus d'Alexandre Grothendieck de les mettre à la disposition de la communauté scientifique[49].

Début 2016, soit un peu plus d’un an après sa mort, les enfants du mathématicien, qui contestent à l'université la propriété des cartons, font en outre inventorier 65 000 autres pages d'archives qui se trouvaient entreposées dans des cantines au dernier domicile de Grothendieck au moment de sa mort[51],[52]. Dans son testament, le mathématicien demande que ces dizaines de milliers de pages manuscrites soient remises à la Bibliothèque nationale de France. Il lève l'interdiction de divulguer ses écrits.

Le , l'université de Montpellier rend ainsi publiques les notes de Grothendieck, soit quelque 18 000 pages de notes manuscrites réparties dans 35 boîtes d'archives. Il s'agit maintenant de décrypter ces notes de calculs, de schémas et d'équations en tous genres, un travail jugé compliqué par le directeur de l'institut Grothendieck de Montpellier, dû non seulement à un problème de lisibilité de son écriture à la main mais aussi de compréhension du fond, car « il faut être dans les mathématiques de Grothendieck pour le comprendre », a-t-il expliqué. Ce travail de déchiffrage devrait visiblement prendre des années mais les mathématiciens s'en réjouissent car, d'après eux, ces notes constituent un trésor pour les mathématiques et une véritable énigme à résoudre[53],[54].

Œuvre

Mathématique

Ci-dessous une liste des principales publications d'Alexandre Grothendieck, proche de celle dressée par le magazine La Recherche en 2014[55]. Une liste plus exhaustive est disponible sur le Grothendieck Circle[56].

Littéraire

  • Alexandre Grothendieck, Récoltes et Semailles : réflexions et témoignage sur un passé de mathématicien, Université Paris 6, Grothendieck Circle, , 929 p. (lire en ligne), ou collection Tel, Gallimard, janvier 2022.
  • Alexandre Grothendieck, La Clef des songes : ou dialogue avec le bon Dieu, Université Paris 6, Grothendieck Circle, , 1027 p. (lire en ligne).
  • Alexandre Grothendieck et Jean-Pierre Serre, Correspondance Grothendieck-Serre, P. Colmez, J.-P. Serre, éds., Documents mathématiques, 2 (2001), Société Mathématique de France, Paris.
  • Joseph Rouzel, La folie créatrice. Alexandre Grothendieck et quelques autres, Editions érès, Toulouse, 2016.

Notes et références

Notes

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Alexander Grothendieck » (voir la liste des auteurs).
(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Sascha Schapiro » (voir la liste des auteurs).
  1. Ce qui justifie la consonance néerlandaise du nom, « Grothendieck ».
  2. La « solution finale de la question juive » a été mise en place courant 1942, à la suite de la conférence de Wannsee, qui s'est tenue début 1942 dans un quartier de Berlin.
  3. Il est invité à participer aux travaux du groupe en 1952[30], mais ne sera coopté qu'en 1956 ou 1957.
  4. Sur l'histoire de l'IHÉS dans ces années, il convient de consulter les travaux de David Aubin, en particulier sa thèse de doctorat.
  5. La lecture d'une carte de la région montre que ce village se situe à faible et égale distance — environ 35 km « à vol d’oiseau » — des deux camps d’internement du Vernet et de Noé où le père de Grothendieck, Sacha Schapiro, a passé les deux dernières années de sa vie, avant qu'il soit déporté puis exterminé : Le Vernet est à l'est de Lasserre ; Noé est au Nord.
  6. En fait, l'hôpital est géographiquement situé dans la commune de Saint-Lizier, limitrophe de la ville de Saint-Girons qui est la sous-préfecture de l’arrondissement de l'Ariège où Grothendieck a passé les dernières années de sa vie.

Références

  1. Cartier et Herreman 2000, p. 10 : « Alexander — il tient beaucoup à cette orthographe » ; mais il signe « Alexandre » ses œuvres en français.
  2. a et b Douroux 11 2014.
  3. a b et c Douroux 02 2012.
  4. « Une occasion pour la philosophie ? » [vidéo], sur le site de l'ENS, .
  5. Entretien avec Michael Harris, La Recherche, 1er avril 2020, page 70.
  6. Dictionnaire des anarchistes, « Le Maitron » : TANAROFF Alexander.
  7. Dictionnaire des anarchistes, « Le Maitron » : Hanka Grothendieck.
  8. Bourbaki 2009, p. 12.
  9. Scharlau, p. 46.
  10. Bourbaki 2009, p. 13.
  11. a et b Bourbaki 2009, p. 14.
  12. Society for Industrial and Applied Mathematics
  13. Cartier 2000.
  14. Scharlau 2008, p. 931.
  15. Bourbaki 2009, p. 15.
  16. Bourbaki 2009, p. 16.
  17. a b et c Jackson 2004, p. 1040.
  18. The Central Database of Shoah Victims' Names : Alexandre Tanaroff.
  19. a et b Jackson 2004, p. 1041.
  20. Voir, Moorehead, 2014, p. 148.
  21. Bourbaki 2009, p. 22.
  22. « Entre 1945 et 1948, je vivais avec ma mère dans un petit hameau à une dizaine de kilomètres de Montpellier, Mairargues (par Vendargues), perdu au milieu des vignes. » - Grothendieck 1986, p. 33, note 1
  23. a et b Grothendieck 1986.
  24. Liste d'universitaires, de 1810 à 1960, concernés par l’enseignement de l’astronomie à la Faculté des Sciences de Montpellier (FSM), publié le par Henri Reboul, sur le site du Laboratoire Univers et Particules de Montpellier (consulté le 8 juin 2019)
  25. [PDF] Dictionnaire des Astronomes Français 1850-1950 : lettre S, page 25/32, publié le sur le site de l'observatoire de Haute-Provence (consulté le 8 juin 2019)
  26. Jackson 2004, p. 1042.
  27. Winfried Charlau, « Grothendieck, un génie des maths devenu ermite », Pour la Science, no 467,‎ , p. 12 (lire en ligne).
  28. Philippe Pajot, « La revanche d'un théorème oublié », La Recherche, no 501,‎ (lire en ligne).
  29. Philippe Douroux, « Alexandre Grothendieck : un voyage à la poursuite des choses évidentes », Images des Mathématiques, CNRS,‎ (lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  30. Compte-rendu de séance de mars 1952.
  31. « Chapter 3. From student to celebrity: 1949-1952 »
  32. Bourbaki 2009, p. 19.
  33. Weber et Rehmeyer 2014.
  34. Un pays dont on ne connaîtrait que le nom (Grothendieck et les « motifs »), Pierre Cartier, 2009
  35. Jean-François Pressicaud, « Journal IPNS - Journal d'information et de débat du plateau de Millevaches - publication papier trimestrielle - Articles - Alexandre Grothendieck en Limousin », sur www.journal-ipns.org, (consulté le )
  36. Alexandre Grothendieck, Survivre et vivre, numéro 9, , 39 p. (présentation en ligne, lire en ligne), p. 16
  37. Azar Khalatbari, « Alexandre Grothendieck enfin publié », Le Nouvel Observateur,‎ (lire en ligne, consulté le )
  38. Hersh et John-Steiner 2010, p. 123.
  39. Grothendieck 1984.
  40. Grothendieck 1991.
  41. Lettre à l'Académie royale des sciences de Suède, A. Grothendieck (Le Monde, 4 mai 1988).
  42. Grothendieck 1986, p. 191-194.
  43. Attribution du prix Crafoord 1988 à P.Deligne et A. Grothendieck, site The Crafoord Prize, consulté le 22 novembre 2014.
  44. Grothendieck Circle, un site consacré à Alexander Grothendieck, qui contenait, jusqu'au mois de mars 2010, une part importante de ses œuvres.
  45. The Grothendieck Festschrift : a collection of articles written in honor of the 60th birthday of Alexander Grothendieck. par Pierre Cartier & al., Springer, 1990 (ISBN 0-8176-3428-2), (ISBN 9780817634285), 520 pages. En ligne
  46. (de) Winfried Scharlau, Die Mutanten — Les Mutants — eine Meditation von Alexander Grothendieck (lire en ligne [PDF]). Sont listés le médecin allemand C. F. S. Hahnemann, le biologiste britannique Charles Darwin, le poète américain Walt Whitman, le mathématicien allemand Bernhard Riemann, le mystique indien Râmakrishna, le psychiatre canadien R. M. Bucke (en), le géographe et anarchiste russe Pierre Kropotkine, le poète et philosophe britannique Edward Carpenter, le psychanalyste autrichien Sigmund Freud, l'occultiste autrichien Rudolf Steiner, l'homme politique et guide spirituel indien Mohandas Gandhi, le paléontologue et philosophe français Pierre Teilhard de Chardin, le pédagogue libertaire britannique A. S. Neill, le moine bouddhiste japonais Nichidatsu Fujii (en), le penseur indien Jiddu Krishnamurti, l'universitaire, agriculteur et penseur chrétien Marcel Légaut, l'anarchiste espagnol Félix Carrasquer (es) et un travailleur américain du nom de Slovic.
  47. [1]
  48. Grothendieck 1986, p. 75.
  49. a et b Douroux 07 2012.
  50. La Recherche, no 440, avril 2010, pp. 18-19. [PDF] « Déclaration d'intention de non-publication », 3 janvier 2010.
  51. Philippe Rioux, « Bataille autour des mystérieux manuscrits du mathématicien de génie », sur www.ladepeche.fr, Toulouse, La Dépêche du Midi, (consulté le ).
  52. Douroux 12 2016.
  53. Sébastien Baer, « Les milliers de notes inédites griffonnées par le génie des maths Alexandre Grothendieck seront-elles déchiffrées ? », sur francetvinfo.fr, .
  54. Philippe Douroux, « Les notes du mathématicien Alexandre Grothendieck arrivent sur le Net », sur liberation.fr, .
  55. La Recherche 04 2014.
  56. Grothendieck Circle.

Voir aussi

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Bibliographie

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