Affaire Alain Lamare

Alain Lamare
Tueur
Information
Nom de naissance Alain Lamare
Naissance (66 ans)
Fruges (Pas-de-Calais)
Surnom Le « tueur de l'Oise »
Condamnation confirmée en
Sentence Irresponsable de ses actes
Actions criminelles Meurtre
Victimes 1 (5 tentatives)
Période juillet 1978-décembre 1979
Pays France
Régions Picardie
Ville Chantilly
Arrestation

Alain Lamare, né le (66 ans) à Fruges (Pas-de-Calais) est un ancien gendarme français, connu du grand public sous le surnom de « tueur de l'Oise »[1] ou de « tueur fou de l'Oise »[2]. Auteur de plusieurs crimes de mai 1978 à avril 1979[2] dans le département de l'Oise, sa participation à l'enquête ralentit beaucoup celle-ci. Arrêté, il est reconnu pénalement irresponsable de ses actes et n'est pas jugé.

Contexte

Dans les années 1970, dans l'Oise, il règne une psychose à la suite de l'affaire Marcel Barbeault (le « tueur de l'ombre »)[2]. Les meurtres de sept femmes et d'un homme, ainsi que de trois tentatives de meurtre, commis entre 1969 et 1976 inquiètent beaucoup.

L'auteur de ces crimes, Marcel Barbeault est arrêté le .

En , à Pont-Sainte-Maxence, le conducteur d'un véhicule volé agresse une jeune fille de dix-sept ans.

L'affaire

La progression

En [1], une Peugeot 504 appartenant à l'épouse d'un gendarme est volée, puis abandonnée au lieu-dit du carrefour des Ripailles, dans la forêt de Chantilly. S'y trouve un plan pour le braquage de la poste de Pierrefonds[1]. Des indices (étuis de cartouches de carabine ou de fusil, cordelette, seringue hypodermique) mettent les forces de l'ordre sur la piste du grand banditisme[1], mais se révéleront plus tard sciemment laissés par le criminel. Cette découverte sera reliée à l'agression par balles d'une jeune fille de dix-sept ans, Karine Grospiron, perpétrée deux mois plus tard à Pont-Sainte-Maxence, par un homme conduisant une Renault 12 grenat volée[1], puis avec la découverte d'une voiture volée et piégée, dont l'explosion blesse un gardien de la paix à Creil[3].

Le criminel nargue les militaires en leur envoyant des lettres manuscrites revendiquant les faits[1]. Ses actes s'aggravent : deux nouvelles agressions de femmes (l'une blessée grièvement et l'autre, paralysée[1]) et en le braquage de la poste de Senarpont[1] ainsi qu'une nouvelle voiture volée et identiquement piégée.

Alain Lamare devient un meurtrier ; après avoir menacé dans une lettre : « la prochaine fois je viserai le cœur », dans la journée du , il tue en bordure de l'hippodrome de Chantilly, de plusieurs balles d'un Beretta 9 mm court (probablement un Beretta modèle 1934, arme appréciée des collectionneurs et des militaires, fournie illégalement par un collègue du tueur[4]) une jeune auto-stoppeuse de dix-neuf ans[5], Yolande Raszewski.

Le , il tire sur une nouvelle victime, Andrée, prise en stop à la sortie de Compiègne. Sortie du coma quelques jours après avoir échappé au tueur, elle en affine le portrait-robot. Son agresseur a échappé aux poursuites.

L'homme laisse à chaque fois des indices et des empreintes, et plusieurs portraits-robots sont dressés. Malgré tout, il continue d'échapper aux forces de l'ordre. Pourtant, dès les débuts de l'affaire, et à la réception de la première lettre, Jean Pineau, commandant de la compagnie de Clermont, avait émis l'hypothèse que le tueur appartienne aux forces de l'ordre, tant les premières lignes de la lettre ressemblaient à la rédaction d'un procès-verbal : le tueur y avait inscrit (dans l'ordre) la marque, le modèle, la couleur et l'immatriculation du véhicule volé. Un détail qui avait donc immédiatement intrigué Pineau lors de la lecture du courrier anonyme. Malgré tout, il garde ses réserves sur cette piste, car ses supérieurs lui font comprendre qu'il est inimaginable qu'un gendarme ou un policier se cache derrière ces crimes.

L'arrestation

Volant la voiture d'un ancien ministre à Rambouillet le , tombant en panne sur l'autoroute, Lamare s'enfuit après avoir été en contact avec les CRS et avoir effacé ses empreintes dans le véhicule[6]. Il s'était fait passer pour le fils du ministre auprès de ces CRS qu'il a lui-même alertés[7]. Le portrait-robot du criminel se précise.

Le [1], les soupçons d'un inspecteur de la PJ de Creil, Daniel Neveu, enquêteur dans l'affaire de Marcel Barbeault, conjugués à ceux du maréchal des logis-chef Claude Morel, l'un des anciens supérieurs de Lamare, s'appuient sur des éléments probants, tels que l'analyse graphologique sur la base de rapprochements d'écritures entre les courriers anonymes et des procès-verbaux de Lamare, ou encore, le courrier manuscrit de demande d'admission dans la gendarmerie[8], avec le dernier portrait-robot. Pineau constate également que Lamare était systématiquement en repos ou en congé, hors du peloton, les jours des meurtres ou des vols de voitures[1].

Le capitaine Jean Pineau, commandant de la compagnie de gendarmerie de Clermont et l'adjudant Henri Cavalier, qui commande le PSIG (peloton de surveillance et d'intervention) de Chantilly, procèdent à l'arrestation du gendarme Lamare. Celui-ci, alors en opérations, est rappelé dans les locaux de la compagnie dans le cadre d'une enquête sur un vol commis par des gens du voyage. Ce prétexte était en fait inventé de toutes pièces par la brigade pour pouvoir tromper puis interpeller Lamare. De retour au PSIG et malgré son comportement nerveux, Lamare laisse dans son véhicule de patrouille son pistolet mitrailleur. Soupçonnant un piège, il tente toutefois de dégainer un second pistolet qu'il avait dissimulé sur lui, mais il est ceinturé par ses collègues.

Gendarme et meurtrier

Pour la gendarmerie, cette arrestation est un choc. L'hypothèse de la culpabilité d'un gendarme était évoquée dès le début des crimes, mais elle avait été écartée pour manque de preuves, mais aussi parce que la thèse semblait inconcevable pour les enquêteurs et leur hiérarchie.

Âgé de 23 ans en 1979, Lamare servait au PSIG de Chantilly[1] et participait aux enquêtes menées contre le tueur de l'Oise (il qualifiait par ailleurs le meurtrier de « salaud de tueur »[2]). Les rapports indiquent d'ailleurs que lui ou ses coéquipiers étaient presque toujours les premiers sur les lieux des crimes. Il est plus tard confondu par ses empreintes digitales, relevées dans les véhicules volés, et finit par tout avouer en garde à vue. La perquisition de son appartement confirmera les faits[1] et viendra compléter les preuves.

Après ses débuts professionnels à Clermont, dans l'Oise, Lamare s'était montré très prompt à dégainer son arme, dans la recherche de flagrants délits au PSIG de Chantilly[9]. Ses missions plus administratives auraient déclenché le souhait de se venger de la Gendarmerie. Les huit crimes, alors récents, de Marcel Barbeault, le « tueur de Nogent », l'ont fasciné. Lamare éprouve des difficultés dans ses relations, notamment avec les femmes, ainsi que des penchants homosexuels refoulés[9]. Lamare possède un goût prononcé pour les armes à feu. Il s'adonne à la consommation excessive d'alcool. Il a volontairement laissé des traces permettant de le confondre, notamment dans le dernier véhicule volé, une Citroën CX abandonnée à Creil. Après son arrestation et ses aveux au juge d'instruction, il restera mutique.

Au total, il sera établi avec certitude qu'il a commis un meurtre et cinq tentatives de meurtres[1], ainsi que quinze vols de voitures. Il est surnommé par la presse le « tueur de l'Oise ».

La nuit de l'arrestation de Lamare, où il est interrogé par le juge d'instruction Marie Brossy-Patin[10], un officier général lui ordonne de signer une lettre de démission « pour sauver l'honneur de l'institution ». Cet acte sera déclaré nul. Lamare perd ses droits antérieurs de gendarme d'active, car le , une décision ministérielle le radie de l'état de militaire par suite d'infirmités non imputables au service[réf. nécessaire], coupant court à toute polémique sur la conservation d'un hypothétique état de gendarme, assorti du versement d'une solde.

Impact médiatique

L'affaire du tueur de l'Oise, qui occupait déjà les médias, connaît alors un fort retentissement médiatique. Foule et journalistes se pressent le lendemain matin à Chantilly, boulevard Michel-Lefébure, lors de la perquisition de l'appartement de fonction de Lamare en présence de ce dernier.

L'affaire d'un gendarme meurtrier révolte et stupéfie.

Des voitures de presse prennent la suite des véhicules de gendarmerie, dans la confusion. Un accident de la route se produit, entraînant la mort d'un adolescent, Gérard Bastien[11].

Irresponsable pénalement

Après des avis divergents d'experts psychiatres, Alain Lamare est déclaré pénalement irresponsable de ses actes[1]. Les experts attestent qu'il est atteint d'une maladie mentale rare : l'héboïdophrénie[1], une forme de schizophrénie. La Gendarmerie n'avait donc pas détecté cette maladie, que ce soit lors de son recrutement, lors de sa formation ou durant ses années de service.

En , un magistrat instructeur du tribunal de Senlis officialise ce constat psychiatrique en rendant une ordonnance de non-lieu. Lamare ne sera jamais jugé[1],[2]. En dépit de l'usage, pour perpétrer ses crimes, d'une arme personnelle, néanmoins fournie par un de ses collègues[12], le Conseil d'État confirme, le [13], une décision du tribunal administratif d'Amiens condamnant l'État français à verser des dommages-intérêts aux parents de Yolande Raszewski.

Lamare est interné en unité pour malades difficiles (« UMD ») au centre hospitalier spécialisé (CHS) de Sarreguemines (Moselle) jusqu'en 2011. Il rejoint ensuite un CHS de sa région natale, à Saint-Venant, dans une unité fermée d'un établissement public de santé mentale (EPSM) du Pas-de-Calais[14] : l'EPSM Val de Lys - Artois à Saint-Venant[15].

Dans les médias et au cinéma

Filmographie

Documentaire télévisé

Émissions radiophoniques

Notes et références

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p et q « Il y a 30 ans, l'étrange cas Alain Lamare », sur courrier-picard.fr, (consulté le ).
  2. a b c d e f et g « Faites entrer l'accusé: saison 2004/2005 », sur programmes.france2.fr, France 2 (consulté le ).
  3. Pascal Michel, 40 ans d'affaires criminelles. 1969-2009, , p. 27-28.
  4. Bruno Fuligni (dir.), Les Bourdes militaires, éditions Prisma, coll. « Folle histoire », , p. 83.
  5. Yvan Stefanovitch, Un assassin au-dessus de tout soupçon, Éditions J'ai Lu, , p. 27.
  6. Pascal Michel, op. cit., sur books.google.es.
  7. Yvan Stefanovitch, op. cit. sur books.google.es.
  8. Voir sur youtube.com.
  9. a et b Guillaume Canet : « Lamare, un tueur non assoiffé de sang » sur lecourrierplus.fr.
  10. Yvan Stefanovitch, Un assassin au-dessus de tout soupçon, Paris, Balland, (ISBN 978-2715804739), pp. 334-336.
  11. Voir sur leparisien.fr.
  12. Bruno Fuligni (dir.), op. cit., sur books.google.es.
  13. Voir sur legifrance.gouv.fr.
  14. Yvan Stefanovitch, op. cit., p. 367.
  15. « Le tueur de l’Oise est interné dans le Béthunois », L'Avenir de l'Artois,‎ (lire en ligne).
  16. a et b Voir sur courrier-picard.fr.
  17. Voir sur nord-pas-de-calais.france3.fr.
  18. Poker tournant, pièce écrite par Jean Thibaudeau et réalisée par Jacques Taroni. Diffusion originale sur France Culture en 1980.
  19. « INEDIT - Le gendarme Lamare, un tueur insoupçonnable - L'intégrale », sur Europe 1 (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Yvan Stefanovitch et Martine Laroche, Un assassin au-dessus de tout soupçon, Éditions J'ai lu, série Crimes & enquêtes, 2001, 310 pages (ISBN 978-2-277-07051-1)
  • Pascal Michel, 40 ans d'affaires criminelles 1969-2009 (chapitre : « L'affaire Alain Lamare, un assassin au-dessus de tout soupçon ») pages 27 à 31, , 208 pages (ISBN 978-1-4092-7263-2)

Articles connexes

Lien externe

Information

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